A dix mois d’intervalle, 2013
aura donc vu disparaître deux maîtres des études médiévales bretonnes, Jean-Christophe
Cassard en tout début d’année et maintenant Bernard
Merdrignac, chef de file incontesté des études hagiologiques régionales.
Comme beaucoup d'entre nous, j’ai fait la
connaissance de Bernard au
colloque organisé en 1985 à Landévennec
pour le 15e centenaire de l’abbaye, colloque dont l’historiographie
aura un jour à restituer la véritable mesure tant il a contribué au renouveau
des études sur la Bretagne au Moyen Âge ; mais c’est surtout à partir du
début des années 1990, dans le cadre du CIRDoMoC,
que mes échanges avec Bernard sont devenus chaque jour plus féconds : marqués
au coin de la courtoisie, de l’humour, de la modestie et de la générosité dont
ce chercheur exceptionnel a toujours fait preuve dans ses relations avec ceux
qui bénéficiaient de son immense savoir, ils ont largement contribué, tout
comme ceux que j’entretenais avec Gwenaël Le Duc, à la définition de ma propre
démarche de recherche définie avant tout comme un traitement heuristique du
matériau hagio-historiographique.
En 1995, sur la recommandation du
regretté André Chédeville, Bernard avait accueilli dans la prestigieuse revue
des Annales de Bretagne et des pays de
l’Ouest, dont il était à la fois le secrétaire du conseil d’administration
et l’un des membres du comité de rédaction, mon travail sur « Guillaume le
Breton et l'hagiographie bretonne aux XIIe et XIIIe siècles ». Non content de m’avoir ainsi précocement témoigné
sa bienveillance en tant qu’éditeur, Bernard par la suite me fit, à plusieurs reprises,
l’honneur et l’amitié de montrer de l’intérêt pour les différentes hypothèses
développées à cette occasion et depuis. En 1996, nous étions ensemble, en
compagnie de son épouse et de Gwenaël Le Duc, au colloque
sur l’hagiographie irlandaise organisé à Cork où nous fûmes accueillis avec
chaleur par Jean-Michel Picard. Des liens forts se sont alors tissés entre nous ; mais la
première déchirure est intervenue une dizaine d’années plus tard avec la disparition
précoce de Gwenaël, en décembre 2006. Peu après, en 2009, sensiblement à l’époque
où Bernard se préparait à recevoir de l’Université un éméritat bien mérité, il
me fit part, avec la pudeur qui le caractérisait, de ses propres problèmes de
santé : les dernières années se sont cependant avérées aussi laborieuses
que studieuses et le livre-testament de notre ami, D’une
Bretagne à l’autre, paru en 2012, dont j’ai eu l’honneur de rendre
compte pour les Annales de Bretagne et des pays de l’Ouest,
témoigne de son insatiable appétit de recherche : jusqu’au dernier moment,
comme le montre son
ultime notule sur son blog, Bernard aura travaillé.
La Faucheuse est sans pitié, mais
surtout sans discernement : non bis
in eodem anno ! avons-nous été nombreux à lui crier, quand les amis de
Bernard furent au courant de la situation de celui-ci. Nous n’avons
malheureusement pas été entendus…
André-Yves Bourgès
Plus d'informations en cliquant ici.
André-Yves Bourgès
Quelques semaines avant la disparition de Bernard, ses amis lui ont remis la pré-maquette et les textes du volume de Mélanges
qu'ils avaient préparé pour lui : Bernard a donc pu prendre
connaissance des différentes contributions qui lui étaient offertes et
c'est lui qui a proposé le plan destiné à les répartir de manière
harmonieuse entre cinq parties dont il a suggéré les thématiques. Cet
ouvrage est ainsi chargé d'une émotion particulière.