"L’Histoire (du Moyen Âge) est un sport de combat, parce que l’Histoire, et au-delà les sciences humaines, est menacée par la posture utilitariste dominante dans notre société, pour laquelle seul ce qui est économiquement et immédiatement rentable est légitime : le reste n’est que gaspillage de temps et de deniers publics. Dans cette situation, l’Histoire médiévale est dans une situation paradoxale puisque s’ajoute à ce déficit général de légitimité des sciences humaines un détournement généralisé du Moyen Âge à des fins variées, jouant tantôt sur le caractère irrationnel et sauvage prêté à la période, tantôt sur la valeur particulière des « racines » médiévales. Le Moyen Âge devient ainsi un réservoir de formules qui servent à persuader nos contemporains d’agir de telle ou telle manière, mais n’ont rien à voir avec une connaissance effective de l’Histoire médiévale." J. MORSEL, L'Histoire (du Moyen Âge) est un sport de combat...

07 juillet 2014

Albert Le Grand et la production hagiographique de Landévennec


 
Nous nous proposons aujourd’hui d’examiner les relations entretenues par le Père Albert Le Grand, de Morlaix, auteur d’une Vie de saints de la Bretagne armorique éditée en 1636-1637, et l’abbaye de Landévennec, laquelle, depuis un quart de siècle, accueille les colloques organisés à l’initiative du CIRDoMoC. Au demeurant, le Père Albert devrait être lui-même compté au nombre des membres d’honneur du CIRDoMoC, car la véritable somme sortie de sa plume est la première du genre concernant la matière bretonne, donc celtique. L’intérêt de son travail hagio-historiographique, replacé dans le contexte de son époque, nous paraît difficilement pouvoir être contesté, même si son approche, sa méthode et ses résultats doivent évidemment faire l’objet de discussions, comme celle que nous proposons aujourd’hui. Au demeurant, son projet, sa démarche et son œuvre s’inscrivent dans une perspective qui, de l’aveu même de l‘écrivain, dépasse de beaucoup la dimension strictement historienne[1], car elle répondait avant tout au commandement reçu en 1627 du vicaire général de la congrégation gallicane des dominicains, Noël Deslandes : faute de l’avoir pris en compte, les critiques adressées, à la suite de Dom Lobineau[2], au Père Albert par de nombreux auteurs — citons par exemple Barthélemy Pocquet du Haut-Jussé[3] ou Henri Bourde de la Rogerie[4] — sont finalement tombées à plat. Il aura fallu attendre l’article fondateur de Mme Dominique Aupest-Conduché en 1966 sur les « Méthodes de travail d’Albert Le Grand, hagiographe breton »[5] et, plus récemment, l’étude du regretté Bernard Merdrignac en 1995 sur « La transmission des vitae médiévales (perdues) par Albert Le Grand, hagiographe du XVIIe siècle » (où, là encore, sont traitées, comme l’indique le sous-titre, les « questions de méthode »)[6], suivie par les deux excellents mémoires universitaires que Philippe Lahellec a consacré en 1996 et 1997 aux travaux du Père Albert[7], pour que ces derniers puissent enfin commencer à être appréciés à leur juste valeur par la communauté scientifique.
La biographie de notre personnage est encore largement empreinte d’obscurité : né à Morlaix, peut-être en 1599, il est mort au couvent de Rennes entre 1640 et 1644 ; nous ne connaissons pas la date exacte de sa profession qui eut lieu vers 1620 également à Rennes, ville où il avait auparavant suivi l’enseignement des jésuites ; frère Albert fut ensuite « assigné » au couvent de sa ville natale à partir de 1623. Nous ne savons pas où, ni quand il reçut la prêtrise. Ph. Lahellec s’est livré à une minutieuse reconstitution des voyages effectués par le dominicain de 1629 à 1633  à travers toute la Bretagne : dans le cadre de la mission qui lui avait été confiée en 1627 et qui prolongeait un premier travail de collecte, localisé initialement en Léon puis étendu au Trégor, le Père Albert a eu ainsi l’occasion de séjourner, outre Morlaix et Rennes, dans les couvents de son ordre à Quimperlé, Guingamp, Dinan, Vitré et Quimper. Il faut également signaler un séjour intermittent de près de trois années à Nantes durant la longue période d’impression (1634-1636) de son grand œuvre, dont l’édition princeps porte le millésime 1637 : à cette occasion, s’ouvrirent devant lui les horizons ligériens qui l’amenèrent à se déplacer jusqu’à Angers ; mais il ne paraît pas avoir poussé plus loin. Comme on peut le constater, ses activités de recherche lui ont imposé sa vie durant de nombreux déplacements dont la fréquence s’avère inversement proportionnelle à la distance parcourue.
Nous savons notamment que le Père Albert se trouvait à l’abbaye de Landévennec en 1629, précisément le 24 février, jour de la saint Mathias[8]. L’époque de cette visite doit être soulignée, car elle se situe dans les tout premiers temps de son séjour au couvent de Quimperlé : la précision de la date fait dire à Ph. Lahellec que, sans doute, « le dominicain ne fit qu’un bref séjour à Landévennec », ce que ce chercheur met en relation « avec l’emploi peu important fait des archives de l’abbaye par le Père Le Grand »[9] ; nous sommes tenté de suivre cette opinion, même si elle ne doit pas être entendue de manière absolue. En tout état de cause, la rédaction finale des Vies de Riok (12 février), de Guénolé (3 mars) et de Guénaël (3 novembre) est vraisemblablement postérieure à cette visite, car les sources alléguées par le Père Albert pour ces trois textes mentionnent explicitement les anciens manuscrits et légendaires du monastère cornouaillais. Cependant les Vies de Riok et de Guénolé intègrent également des traditions léonardes : ces traditions doivent sans doute être rapportées aux débuts de la collecte hagiographique entreprise par le Père Albert, quand ce dernier s’était retrouvé « destiné pour faire les questes ordinaires par les paroisses de l’Evesché de Leon ». Ainsi les textes concernés ont-ils pu être complétés, au moment même de leur impression, avec les matériaux collectés à Landévennec ; mais déjà aux années 1460-1480, Pierre Le Baud avait recueilli la tradition relative à l’établissement de Fracan et de sa famille en Léon, plus précisément à Lesguen (aujourd’hui Lesven) en Plouguin[10], tradition connue des moines de Landévennec, comme nous le verrons plus loin, et dont on trouve l’écho dans une copie tardive du cartulaire de l’abbaye[11].
Quoi qu’il en soit, les assertions du Père Albert ne méritent pas le dédain dont elles ont fait longtemps l’objet : sa visite à Landévennec étant motivée par les besoins de son enquête, c’est donc sur les résultats de ses investigations qu’il convient d’en mesurer l’éventuel intérêt archivistique et archéologique ; nous verrons à ce propos que le personnage historico-légendaire de Gradlon était alors au cœur de ses préoccupations. La biographie léonarde de Guénolé dont le dominicain a fait état dans la première partie de sa Vie du saint, mérite également un rapide examen.  Enfin, il paraît que le Père Albert a pu recueillir lors de son déplacement certaines anecdotes qui avaient cours dans les parages mêmes de l’abbaye : outre ce qui concerne un disciple de Guénolé appelé Balai, une autre de ces traditions a ainsi passé dans son ouvrage ; mais elle ne paraît guère avoir été remarquée jusqu’ici[12].

Gradlon
Gradlon tient une large place dans l’ouvrage du Père Albert, dont il contribue à structurer la chronologie par la date-pivot de son décès (405) : c’est qu’à l’instar de son contemporain Usher, notre hagiographe «  est un amateur de chronologie » ;  mais F. Duine a beau jeu de souligner que « les combinaisons de l'un valent à peu près les combinaisons de l’autre »[13].  Outre les Vies de Guénolé, Ronan et Corentin, Gradlon est mentionné à propos de la fondation de l’abbaye de Rhuys dans un addendum à la Vie de Gildas ainsi que dans celle du restaurateur de ce monastère, Félix. Il figure également en tant que repère chronologique dans les Vies de Riok,  Nennok, Sezni et Guénaël. Enfin, dans celle de Guénégan, il est fait référence aux études que le saint effectue à Quimper, « au fameux College fondé jadis par le Roy Grallon pour l’instruction des jeunes Seigneurs de son Royaume »[14].
La figure de Gradlon, chez les auteurs qui ont eu à traiter de l’histoire des origines bretonnes en général et de la Cornouaille en particulier, a emprunté, on le sait, la majorité de ses traits au « roi de papier » qui est employé dans le dossier hagiographique carolingien de Guénolé : ainsi, selon le Père Marc Simon, il faut sans doute reconnaître en Gradlon, tel qu’il apparaît sous la plume de Clément et de Wrdisten, un avatar du roi Salomon de Bretagne[15], tandis que le personnage homonyme qui, à de nombreuses reprises, est mentionné en qualité de donateur dans les chartes de Landévennec, personnifie peut-être le lignage des seigneurs de Châteaulin, bienfaiteurs de l’abbaye[16]. Joëlle Quaghebeur, s’efforçant, dans sa belle thèse sur la Cornouaille du IXe au XIIe siècle, soutenue en 1994[17], de concilier l’approche traditionnelle, érudite, d’un matériau diplomatique au demeurant modeste, tardif et disparate, avec une réflexion de nature quasi anthropologique sur la Mémoire cornouaillaise, sa transmission ou sa destruction, sa préservation ou sa falsification, a posé à cette occasion la question de l’éventuelle réalité historique de Gradlon[18]. Comme en écho, le regretté Jean-Christophe Cassard, dans un article de 1995 consacré à « la mise en texte du passé par les hagiographes de Landévennec au IXe siècle »[19], s’était lui aussi interrogé sur la « mémoire monastique », son authenticité et les « vecteurs » de sa transmission[20] : dans cette perspective était à nouveau évoqué, mais très sommairement hélas, le personnage de Gradlon, dont J.-C. Cassard jugeait l’historicité  « vraisemblable »[21].  Aux alentours de l’An Mil, Létald de Micy nous a d’ailleurs conservé le souvenir d’un potentissimus breton de ce nom, venu terminer ses jours, dans la seconde moitié du IXe  siècle, au monastère de Noirmoutier et présenté comme l’oncle de l’abbé de Micy, un certain Benoît, apparemment évêque en Bretagne ; mais si l’origine cornouaillaise de ce Gradlon est probable, elle n’est pas absolument assurée, d’autant qu’une charte de Redon, aux années 840-846, nous apprend l’existence à Guer d’un machtiern homonyme : si, comme peuvent le suggérer certains marqueurs onomastiques mis en évidence avec finesse par J. Quaguebeur[22], ce personnage appartenait, ou du moins touchait de près, à la puissante dynastie machtiernale issue de Jarnhitin, il conviendrait alors de reconsidérer les origines du futur lignage comtal de Cornouaille[23], ainsi que leurs rapports avec les Alanides.
Ce rapide résumé du status quaestionis au sujet de Gradlon doit nous encourager à reconnaître loyalement que l’approche du Père Albert n’était pas, compte tenu des moyens historiographiques de son époque et des outils de recherche dont il pouvait disposer, aussi fantaisiste qu’on le dit. A la fin du Moyen Âge, le souvenir de Gradlon était non seulement gravé dans la mémoire des Cornouaillais, mais encore dans la pierre de leur cathédrale, comme en témoignait alors l’inscription placée sur la façade occidentale du monument, juste au-dessous de la statue équestre du personnage ; inscription disparue en même temps que cette statue lors des destructions de 1793 et dont le texte nous a été conservé par… le Père Albert lui-même[24], décidément incontournable, d’autant qu’il est, en l’occurrence, notre seul témoin ! Du Buisson-Aubenay, par exemple, « touriste » curieux et cultivé, qui, à la même époque, décrit avec d’assez nombreux détails la cathédrale de Quimper[25], ne fait pas plus mention de la statue de Gradlon que de l’inscription. Pour sa part, le Père Albert fixe la date de composition de cette dernière à l’année 1424[26], à l’époque où le chantier de réfection de la cathédrale, initié par l’évêque Bertrand de Rosmadec avec le soutien du duc Jean V, battait son plein. Voici le texte en question :
Com’ au Pape donna l’empereur Constantin
Sa terre, aussi livra cest’ à S. CORENTIN,
GRALLON, ROY Chrestien des BRETONS ARMORIQUES[27],
Que l’an quatre cents cinq selon les vrais chroniques
Rendit son ame à Dieu, cent et neuf ans ainçois
Que Clovis premier Roy Chrestien des François,
Cy estoit son Palais et triomphant demeure :
Mais voiant qu’en ce monde n’est si bon qui ne meure,
Pour eternel’ memoire sa statue à cheval
fut cy-dessus assize au haut de ce portal,
Sculpée en pierre bize, neufve et dure,
Pour durer à jamais si le portail tant dure,
A LANDT-TEVENEC[28] gist dudit Grallon le corps.
Dieu par Sa Saincte grace en soit misericords.

Lors de nos derniers échanges avec le regretté Bernard Merdrignac, nous étions tombé d’accord avec ce chercheur, comme ce fut souvent le cas, pour souligner l’habile (?) rapprochement, sans doute entériné par le duc à la demande de l’évêque de Quimper, entre la donation de Gradlon à Corentin et celle de Constantin au pape Sylvestre, même si cette dernière, dont la valeur était déjà révoquée en doute par Nicolas de Cues, allait être bientôt magistralement convaincue de fausseté par Lorenzo Valla.

Archivistique
Le Père Albert est donc désormais à pied d’œuvre à Landévennec : il est venu chercher de quoi compléter sa documentation sur Gradlon et voici qu’on lui exhibe rien moins que le procès-verbal des funérailles du monarque, célébrées à l’abbaye par un évêque nommé Guennec (Guennucus) – notons qu’il s’agit du véritable éponyme du lieu, mais le Père Albert semble l’ignorer et lui substituera d’ailleurs le nom de Guénégan – en présence de Guénolé et de ses moines, de Gildas, abbé de Rhuys, ainsi que plusieurs ministres du culte parmi lesquels les prêtres en charge des paroisses voisines d’Argol et de Dinéault. Parmi les laïcs, outre le roi Salomon et la reine Havoise, l’assistance comptait un machtiern, trois vicomtes et deux titulaires d’honores : Fracan, comte de Léon et Tugdon, comte de Goëllo[29]. Naturellement le dominicain ne songe même pas à discuter l’authenticité d’une pièce qui comble si  bien ses attentes et qui lui procure notamment le nom de l’épouse de Gradlon, Havoise (Adevisia), dont il fera soigneusement état dans son « Catalogue généalogique et chronologique des roys et roynes, ducs et duchesses de Bretaigne armorique » en alléguant la source en question[30]. Par ailleurs, la mention à la suite du nom de Guénolé, abbé de Landt-Tequennok, d’un certain Hamon, qualifié « prieur de ce même château » (Haëmo ejusdem Castelli Prior ») encourage, sans autre fondement, le Père Albert à opérer une distinction entre le « KASTELL-TEVENEC, prés le Faou », où Gradlon aurait rendu son dernier soupir, et l’abbaye de Landévennec où le monarque aurait reçu sa sépulture. On voit par conséquent que le dominicain ne saurait être identifié avec l’auteur de cette pièce, laquelle sans aucun doute faisait déjà à l’époque partie du chartrier de l’abbaye.
Peut-on en savoir plus sur ce document, dont on n’a pas conservé de traces en dehors de l’extrait rapporté dans l’ouvrage du Père Albert ?
Tout d’abord, il convient de remarquer qu’au sein des « écritoires » monastiques de Bretagne, à Landévennec, mais aussi à Redon, à Rhuys, ou encore à Saint-Jacut, pour ne citer que des abbayes bénédictines, qui ne sont pas les seules dans ce cas, les pratiques de forgerie, de falsification ou à tout le moins d’interpolation des archives, n’ont jamais véritablement cessé, au-delà même de la période tardo-médiévale qui paraît la plus concernée[31]. Ainsi à Landévennec, en 1690, lorsque les titres, indûment détenus depuis le début du siècle par les abbés, furent enfin déposés au monastère, le procès-verbal de réintégration signale « plus de cent falsifications (textes grattés, découpés, etc.) », faisant ainsi écho aux plaintes des moines qui reprochaient à leur abbé, Jacques Tanguy, « de recéler les titres et même de les falsifier »[32]. Ces faits, qui naturellement n’étaient pas imputables au seul Tanguy, car avérés depuis l’époque de la compilation du cartulaire, au milieu du XIe siècle, sont corroborés par un témoignage contemporain, certes formulé de façon excessive car son auteur, sans le renier, en a par la suite ramené les termes à de plus justes proportions[33], mais indubitable puisqu’il émane d’un expert qui avait œuvré sur place : témoignage accablant, qui figure dans une lettre du Père Richard Simon à Jean-Baptiste Du Hamel rapportant les propos répétés de Dom Veissière sur le fait « que de douze cens chartres qui lui avoient passé par les mains, lorsqu’il étoit dans l’abbaye de Landevenet près de Brest, il en avoit trouvé au moins huit cens de fausses »[34]. Que le personnage ait « mal tourné », comme en juge le dernier historien de l’abbaye[35] – comprenez que Veissière a par la suite défroqué, s’est converti au protestantisme et s’est marié – n’invalide pas son expertise, effectuée à l’époque où son talent de diplomatiste lui valait les faveurs de Dom Maur Audren de Kerdrel qui souhaitait d’ailleurs lui confier, de préférence à Dom Lobineau, la direction du grand projet d’Histoire de Bretagne conduit par les Mauristes[36].
Pour en revenir au récit des funérailles de Gradlon, de quels matériaux disposait l’auteur de cette forgerie et comment les a-t-il mis en œuvre ? Outre les actes du cartulaire, auxquels il a apparemment emprunté certains noms de témoins (Daniel, Bili, Alfred, Melchun, …)[37], il a eu manifestement recours au martyrologe-obituaire de l’abbaye, compilé en 1293, aujourd’hui perdu, mais dont le Père Albert (toujours lui !) et son contemporain Dom Noël Mars nous ont conservé quelques vestiges[38] : c’est dans ce document que le faussaire a trouvé la mention de l’obiit de Gradlon le Grand, roi de Bretagne, fondateur du monastère (rex Graslonus magnus, rex Britanniae, fundator istius monasterii) avec la fameuse date de 405[39]. Par ailleurs, il mentionne en tant que moines du lieu, outre Biabili et Martin qui sont explicitement désignés dans un acte du cartulaire comme des disciples de Guénolé[40], plusieurs saints dont il est fait mémoire au martyrologe : c’est notamment le cas de Jacut[41] qui, à l’instar de ce qui s’est passé pour Balai[42], a peut-être été introduit dans le sanctoral de Landévennec aux XIe-XIIIe siècles, par le biais d’échanges avec le monastère de Landoac (Saint-Jacut-de-l’île)[43] ; ou bien encore celui de Guenaël, qui figure en qualité de premier successeur de Guénolé dans la liste des abbés dressée lors de la composition du cartulaire[44] ainsi que dans un des actes de cette compilation[45]. Le nom Perceval, apparu tardivement dans l’onomastique bretonne, est l’indice que la forgerie ne saurait être beaucoup plus ancienne que les dernières décennies du XIVe siècle. Enfin, tandis qu’il mentionne les recteurs d’Argol et Dinéault, le faussaire omet celui de Landévennec, alors que la première attestation de cette paroisse en tant que telle date de 1520. Voici donc, sous réserve de recherches plus approfondies, les deux termini que nous retiendrons pour la composition de ce faux, lequel pourrait donc avoir été sensiblement contemporain de l’inscription de la cathédrale de Quimper.
Comme nous venons de le dire, le Père Albert a eu sous les yeux à Landévennec le martyrologe-obituaire du lieu : on peut le constater entre autres à propos de Balai. Ce dernier est présenté  comme un « disciple de saint VValeri » par le dominicain qui, en outre, localise l’ermitage du personnage « dans la montagne de PENN-FLOUR, prez le Chasteaulin où on a depuis basti une Chapelle en son honneur et y a on recours pour retrouver les choses esgarées »[46]. Si la spécialisation de Balai, qui fait de lui un concurrent de saint Antoine de Padoue, n’est évidemment pas sans intérêt, car on peut supposer qu’elle reflète une croyance locale, c’est surtout l’indication concernant Valeri qui doit retenir notre attention : le nom de ce saint, qui n’est pas breton, se retrouve en effet dans le toponyme Saint-Gallery en Matignon, prieuré fondé en 1208 par Olivier de Matignon comme dépendance de Saint-Valéry-sur-mer[47] et dont la possession fut transférée dès 1245 aux moines de Saint-Aubin-des-Bois par les Gouyon, héritiers et successeurs des Matignon[48]. Or, Saint-Gallery est situé à moins d’une quinzaine de kilomètres de Ploubalay, dont le nom a été formé avec celui de notre personnage, et qui, dès 1163, dépendait de Saint-Jacut-de-l’île[49] : cette proximité géographique, l’intérêt dont la famille Gouyon, fortement implantée dans tout le périmètre concerné, faisait montre à l’égard de ces deux abbayes, comme il se voit là au travers des pièces d’archives, certaines authentiques, d’autres controuvées, issues ou réputées issues de leurs « écritoires », pourraient assez facilement expliquer qu’au moment de l’introduction de son culte à Landévennec, Balai était considéré comme un disciple de Valeri[50].  
A Landévennec, le Père Albert a également consulté la copie d’anciennes chartes du monastère ; ou du moins et plus précisément, comme il se voit au travers des extraits qu’il en a tirés et qu’il nous a transmis, il a colligé la première pseudo-charte de Gradlon, qui forme les n° 3 à 8 dans l’édition de référence du cartulaire[51], ainsi que l’acte relatif à la donation du roi après la mort de son fils Rivelen[52]. Comparée à l’aune de la transcription effectuée par les éditeurs du cartulaire, celle du Père Albert s’avère très correcte, meilleure en tout cas, sur la même base de comparaison, que celle de Dom Morice[53]. Au demeurant, nous ignorons  la nature de sa propre source : s’agit-il d’un manuscrit ancien du cartulaire, par exemple celui du XIe siècle que nous avons conservé[54] ? D’un manuscrit plus récent, comme la supposée copie intermédiaire de 1436, aujourd’hui disparue, ou bien celle du XVIe siècle, toujours à disposition[55] ?  Ou encore de quelle que chose d’autre[56] ?  En tout état de cause, il est difficile d’imaginer qu’il n’ait pas pris connaissance à cette occasion du dossier hagiographique de Guénolé : dans la notice composée par le Père Albert, figurent en effet la totalité des miracles dont avait fait état Wrdisten, de même qu’un résumé assez sec mais fidèle du portrait spirituel du saint brossé par ce  dernier ; plusieurs anthroponymes sont d’ailleurs rapportés par le dominicain sous la forme qui figure dans la vita ancienne[57]. Cependant, l’ensemble a fait l’objet d’une véritable « recomposition » par notre auteur[58], dont éclate à cette occasion le véritable talent de rewriter, afin de permettre l’intégration à son récit d’anecdotes relatives 1°) à la naissance de Guénolé en Léon, 2°) à sa formation en Cornouaille auprès de Corentin (en lieu et place de celle reçue en Goëllo auprès de Budoc), 3°) à son attitude de nouveau Moïse lors de la bataille de Guissény, où, grâce à ses prières, son père Fracan peut repousser l’assaut de « certains pirattes payens » (démarquage d’une anecdote qui figure dans la vita de Goulven[59]), 4°) aux circonstances de la fondation de l’abbaye de Landévennec, 5°) enfin, à l’histoire tragique de la fin de la ville d’Ys. Il n’est pas douteux que, dans ce dernier cas, le Père Albert a suivi des traditions plus anciennes qui figuraient déjà dans les ouvrages de Pierre Le Baud[60], de Bertrand d’Argentré[61] et du chanoine Moreau[62] ; traditions qui se retrouvaient également dès cette époque dans la littérature bretonne[63] où elles se sont prolongées durablement[64].
Est-il possible d’aller plus loin, notamment en ce qui concerne les traditions propres aux origines léonardes de Guénolé ? Nous avons déjà évoqué la présence, dans la copie du cartulaire effectuée au XVIe siècle, d’une pseudo-notice qui évoque la situation géographique des possessions armoricaines de la famille du saint, possessions qualifiées modestement possessiuncula, mais qui, selon cet acte, s’étendaient depuis la mer au nord jusqu’à l’Elorn (divisio istius possessiuncule est a mari septentrionali usque ad flumen Elorn) : sont explicitement désignées, d’une part, une « cour » (seigneuriale)  bizarrement qualifiée « sanguinaire » (in curia sanguinaria), ce qu’il faut plutôt entendre « sanglante, sanguine »,  peut-être en rapport avec la couleur rouge qui aurait caractérisé l’endroit ; d’autre part la seigneurie de Lesguen, aujourd’hui le double toponyme Lesven (-Bras et -Bihan) en Plouguin, facilement identifiable par sa localisation à proximité de la rivière du Garo (in dominatione curie Albe site juxta fluvium qui dicitur Asper) et dont le sens originel, descriptif de la couleur des lieux (« la  cour blanche »), a fait à cette occasion l’objet d’une réfection savante (« la cour de Blanche »). La pseudo-notice constate la transmission de ces biens aux héritiers séculiers de Clervie (iste littere narrant quod heredes seculares Clervie succedunt Fragano Cathovii et Albe Trimammi in hereditatibus sitis in Armorica) et précise leur origine, à savoir une donation effectuée par le roi Gradlon (a rege Gradlon eisdem traditis et perpetualiter concessis)[65]. Faux impudent, bien sûr, au regard de l’hypercritique et dans lequel il serait vain, comme l’a montré jadis Robert Latouche de manière positive, pour ne pas dire « positiviste », de vouloir retrouver, comme le pensait F. Jourdan de la Passardière, le véritable contexte géographique de l’établissement de Fracan et de sa famille[66] ;  mais le débat n’est évidemment pas là : nous comprenons à l’examen de ce faux que son auteur a travaillé pour le compte des seigneurs de Lesguen ; nous pouvons de surcroît constater que le faussaire a fait preuve à cette occasion de sa capacité à « recycler » les éléments topologiques qui figurent dans le texte de Wrdisten, jusqu’à se montrer, au dire de critiques avisés, plus convaincant que ce dernier[67]. Ainsi en est-il de la formule sur inundatione cujusdam fluvii qui proprie sanguis dicitur, « arrosé par les eaux d'une rivière appelée littéralement sang » ; formule que le faussaire, après l’avoir appliquée au cours d’eau qui arrose la « cour sanguinaire », a voulu expliciter et renforcer au profit de sa forgerie en précisant qui proprie dicitur sanguis a capite sang fluentis. Pour les deux auteurs, il s’agissait de jouer sur l’interprétation d’un hydronyme présentant une certaine homophonie avec le breton gwad, « sang » : la rivière du Gouët à Ploufragan dans le premier cas et, dans le second, un cours d’eau qui tirerait son nom et son origine d’un nom de lieu *Pengoat, formé avec les termes penn, « tête, bout », et goad, forme lénifiée de koad, « bois ». De fait, un tel toponyme est attesté à proximité de Plouguin,  à Coat-Méal et à Milizac, où, en outre, deux villages s’appellent respectivement Le Goadec et Langoadec, ce qui n’est pas sans évoquer le nom de la curia sanguinaria[68]. Cependant, on admettra sans peine que le confinement à un territoire aussi modeste de possessions décrites comme s’étendant sur une zone beaucoup plus vaste n’est guère satisfaisant et qu’il convient en conséquence d’élargir notre périmètre d’investigation : notre attention ne peut manquer d’être attirée, à une vingtaine de kilomètres de Plouguin, par le nom de Saint-Frégant, qui, à l’instar du toponyme Menfrancan en Plounéour-Trez, a pu être rapproché par la tradition de celui du père de Guénolé. Or, à Saint-Frégant, à proximité du château de Penmarc’h où Chaucer, vers le milieu du XIVe siècle, a situé l’action de son Conte du Franklin, on voit, non loin du village de Penhoat, les vestiges de l’importante villa gallo-romaine de Kerradennec, que les anciens du pays, aux dires de Potier de Courcy, appelaient au XIXe siècle encore « la ville rouge » pour décrire les ruines de ses murailles de briques : « la ville rouge » correspondant exactement au toponyme breton Kayrrud rapporté par Chaucer[69], cette appellation pourrait donc avoir suggéré au faussaire le recours à l’adjectif sanguinarius. En outre, à une quinzaine de  kilomètres au nord, non loin de Menfrancan déjà mentionné, on trouve en Brignogan le havre de Pontusval, qui, comme l’a montré Bernard Tanguy en 1985, tire son nom de celui de Budmael (Budoc) : lieu chargé d’histoires et de légendes, déjà mentionné au XIe siècle dans le cartulaire de Landévennec au nombre des possessions de l’abbaye et où, d’après le Père Albert, la vita perdue de  Rioc, moine du lieu, plaçait l’épisode de la précipitation dans la mer du dragon qui, auparavant, hantait les terres d’Elorn, seigneur de la Roche-Maurice[70].
Cette analyse discursive nous aura permis de mesurer, au moins pour une partie, l’ampleur des traditions, aujourd’hui disparues, qui sous-tendent l’œuvre du dominicain : ces traditions formaient la véritable geste hagiographique de la Bretagne à l’époque tardo-médiévale, dont nous n’avons plus malheureusement que le palimpseste. On peut ainsi constater que certaines d’entre elles, d’origine manifestement cornouaillaise et plus particulièrement landévennecienne, ont fait l’objet d’une transplantation réussie en Léon, comme il se voit également au travers de la légende mariale de Salaün[71]. Encore convient-il, pour exploiter au mieux les rares données ainsi conservées, les combiner avec les quelques témoignages archéologiques apportés de manière fortuite par les contemporains, au premier chef le Père Albert.

Archéologie
Mettons nos pas dans les siens, suivons cet insatiable fouineur d’archives et de bibliothèques, qui est aussi un homme de terrain. Son intérêt pour les vestiges de type archéologique est patent : il sait en particulier que la lecture de leurs inscriptions peut se révéler aussi riche que celle d’une charte et sa frustration est perceptible quand il échoue à les décrypter[72] ; mais il est également sensible aux décors de ces vestiges, à leurs peintures et à leurs sculptures, notamment ce qu’il appelle les « images », c’est-à-dire les statues. Les tombeaux historiés, comme celui de Briac, à Bourbriac, les vitraux de même, tel celui de Similian, à Nantes, lui apportent des renseignements souvent inédits sur la biographie  de ses héros ; les tableaux, comme ceux de Françoise d’Amboise ou de Jean Discalcéat, lui donnent à  voir leur portrait. Il sait en outre comment utiliser les éléments de la tradition orale, ainsi qu’en témoigne ce qu’il rapporte des écobues miraculeusement changées en pierre à Plabennec, ou encore ce que l’on pourrait appeler sa « monographie archéologique » de Plouzané, dont les chercheurs d’aujourd’hui demeurent largement tributaires, notamment quand il s’agit d’éclairer les origines de la troménie locale[73].
A Landévennec, on peut donc sans difficulté imaginer le Père Albert furetant dans l’abbatiale, dont il repère immédiatement les deux principaux monuments, du moins ceux qui peuvent s’avérer utiles à son travail : le tombeau de Gradlon et celui de Guénolé. Le premier avait déjà fait l’objet de descriptions[74] ; en revanche, le second était apparemment resté jusqu’alors ignoré des historiens et, aussitôt après la visite du dominicain, il devait d’ailleurs retomber dans l’obscurité. Il faudra attendre la révolution pour voir la destruction de l’un et l’autre, dans des circonstances qui, au demeurant, ne sont pas absolument éclaircies. Au fait, s’agit-il vraiment de tombeaux, ou plutôt de cénotaphes ? Au cours de la seconde moitié du IXe siècle,  le chœur de la grande église avait fait l’objet d’aménagements destinés à accueillir les restes de Guénolé transférés depuis l’ancienne abbatiale devenue oratoire. « Les fouilles ont permis de constater qu’il s’agit là du seul tombeau admis dans l’abbatiale : il en reste un caveau maçonné, avec des traces d’enduit interne »[75] ; mais il ne s’agit pas du monument décrit par le Père Albert, à savoir « un coffret ou charnier de pierre, eslevé sur des pillastres de deux piés et demy de hauteur, contre le paroy de la Chappelle qui fait l’aisle gauche de la croisée de l’Eglise de Landt-Tevennec »[76], description corroborée quelques années plus tard par celle de Dom Mars qui donne à voir « un sépulchre à l’antique, tout de pierre, supporté de quatre petits piliers de mesme »[77]  et qui affirme nettement son caractère cénotaphique (sepulcrum lapideum quod, etiam absente sancti corpore, fideles venerantur)[78]. Il n’est pas question d’inscription, encore moins d’épitaphe, non plus que de gisant ou d’une quelconque représentation du saint. Quant au tombeau du roi Gradlon, tout laisse à penser qu’il s’agissait de celui d’un homonyme et on a notamment évoqué l’abbé qui était à la tête du monastère à l’époque de la construction de ce monument, dans la première moitié du XIIe siècle : « il est logique que cet abbé, qui serait d’ailleurs issu de la famille comtale de Cornouaille, se soit aménagé un tombeau près du chœur »[79] ; mais l’hypothèse de la sépulture d’un laïc appartenant à la même famille nous semble également recevable, auquel cas l’épitaphe, dont « le premier vers se rapproche beaucoup de hoc in sarcophago Matheus clara propago, gravé sur le tombeau de Matthieu d’Alsace » [80], aurait pu faire l’objet d’« adaptations » afin de mieux « coller » à la figure légendaire du monarque. Malheureusement pour les archéologues qui ont procédé aux dernières campagnes de fouilles, « le tombeau de Gradlon ayant été pillé et vidé à la Révolution, la tombe elle-même retirée et vendue, l'ensemble « fouillé» tout au long du XIXe siècle, il ne restait plus guère d'indications en place »[81]. Le témoignage du Père Albert s’inscrit dans le prolongement de ceux de ses aînés, qu’il vient renforcer : à son époque et depuis quelques deux siècles au moins, on considérait, sur la foi de l’épitaphe gravée sur le tombeau, que le roi Gradlon reposait en ce lieu. Si Dom Mars a souligné avec raison que cette inscription, qui, apparemment, se présentait en deux parties, était plus récente que l’époque à laquelle était supposé avoir vécu le monarque, le fait de révoquer en doute la date assignée à la mort de Gradlon[82] n’implique pas qu’il fît preuve d’un plus grand sens critique que le Père Albert, mais seulement que son propre système chronologique était différent de celui du dominicain. Ainsi, le texte de cette épitaphe, qui témoigne d’un « remploi d’expressions très répandues » et « dont le style général s’inscrit clairement dans la tradition des XIIe-XIIIe siècles » donne conséquemment une incontestable impression de véracité s’agissant d’un personnage qui aurait vécu à cette dernière époque ; mais, comme la perspective dans laquelle se situait le Père Albert était la même que celle des moines de Landévennec, visant avant tout à « reconstruire la mémoire de leur fondation en donnant une place plus importante à Gradlon » [83], nul doute que, dans la pénombre de la chapelle « fort basse, petite et étroite » où se trouvait le tombeau concerné, tandis qu’il cherchait à déchiffrer, « sur la paroy en dehors droit sur la porte », les caractères gravés dans la pierre, il n’ait été enclin à confirmer la lecture de ses prédécesseurs.

Traditions populaires
Nous terminerons ce rapide tour d’horizon des relations entretenues par le Père Albert avec l’abbaye de Landévennec en relevant dans son ouvrage une tradition locale qui ne paraît pas avoir connu de véritable écho, mais dont il serait néanmoins intéressant de connaître l’origine.
A propos de la fondation de son cher couvent de Bonne-Nouvelle, le Père Albert s’est efforcé de montrer par différents exemples la dévotion mariale des rois et ducs de Bretagne ; le premier de ces exemples est donné par Gradlon : le roi en effet aurait fondé en la paroisse d’Argol l’abbaye de Landévennec, placée originellement sous l’invocation de Notre-Dame parce qu’il attribuait à l’intercession de la Vierge la victoire remportée « en la pleine d’Argol » sur les Danois dont il avait « taillé vingt-cinq mille des leurs en pieces » [84]. L’authenticité de cette tradition est bien entendu, là encore, invérifiable ; mais qu’en est-il de sa popularité ? La topographie, sinon même la toponymie l’aurait-elle inspirée ? Quelqu’ancienne gwerz en avait-elle conservé le souvenir à l’époque où le Père Albert parcourait la campagne environnante ? En l’absence de tout élément probant, il ne saurait être question de faire fond sur le témoignage du dominicain ; mais pour autant, eu égard aux autres résultats de notre rapide enquête, il nous semble difficile désormais de l’écarter sans discussion. 

Nous espérons ainsi, au travers de l’examen des relations du Père Albert avec l’abbaye de Landévennec, avoir attiré l’attention sur l’importance du corpus hagiographique réuni par ses soins et dont, quelles que soient la nature particulière et la vigueur de son traitement des sources, quels qu’éloignés soient de notre propos les objectifs qu’il poursuivait en tant qu’auteur post-tridentin, nous affirmons que les études hagiologiques concernant la Bretagne au bas Moyen Âge s’avèrent plus que jamais tributaires. 

André-Yves Bourgès




Annexe
Analyse de la Vie de Guénolé composée par le Père Albert Le Grand et concordance avec les deux premiers livres de la vita Winwaloei composée par Wrdisten (VW, I et II)
En gras, les éléments du récit qui ne sont pas empruntés à celui de Wrdisten

§ 1. Les parents de Guénolé, Fragan et Guen, « c’est-à-dire Blanche » [VW I, 2 : Fracanus, Alba] : Fragan, nommé gouverneur de Léon et Cornouaille par son oncle le roi Conan Meriadec, s’est installé avec son épouse en Léon, à Plouguin, « dans un beau Chasteau qui, du nom de la Dame, fut nommé LES-GVEN » ; étymologie du nom Guénolé (Guennolé) « en langage breton, il est tout blanc » [VW I, 3 : quem genitum puro nomine appelant Uuinualoeum].
§ 2. Guénolé parvenu à l’âge de 12 à 15 ans, Fragan veut le conduire à la cour du roi pour qu’il embrasse la carrière des armes ; mais le jeune homme a d’autres projets et obtient par ses prières qu’un miracle « météorologique » ramène son père à de meilleurs sentiments [VW I, 3]
§ 3. Guénolé est alors mené à Corentin, en l’ermitage de ce dernier dans la paroisse de Plomodiern, « sous le Menez Cosm » ; lors du voyage, le jeune homme, par un signe de croix, calme une nouvelle tourmente [VW I, 4]. Jacut [dont le Père Albert ignore (volontairement ?) qu’il est traditionnellement identifié avec Jacob, l’un des deux frères de Guénolé (VW I, 2)] et Tugdin sont ses condisciples à l’école de Corentin.
§ 4. Le roi Gradlon succède à Conan Mériadec. Tandis que son fils, présent sur place, prie pour le succès des armes de Fragan, celui-ci obtient une nouvelle victoire sur « certains pirattes payens » qu’il avait précédemment chassés du Léon : la vue des mâts des nombreux navires ennemis est à l’origine de l’érection de la croix dite « Croas al Mil Guern », non loin de Lavengat en Guissény. Pour célébrer cette victoire, Fragan et les autres chefs de l’armée fondent, à l’instigation de Guénolé, un monastère en l’honneur de la Sainte Croix et nommé Lochrist sur les lieux mêmes de la bataille, désignés sous le nom breton « an Isel-vez » [cf. dans la vita de Goulven le récit de la bataille livrée par Even le Grand contre les Normands].
§ 5. Guénolé, de passage à Is, ressuscite un jeune seigneur malencontreusement tué dans un tournoi [VW I, 18].
§ 6. De retour à l’ermitage de Corentin, Guénolé guérit un écolier qui s’était rompu la cuisse [VW I, 7] ; il guérit un autre de ses condisciples, Thethgonus, qui avait été mordu par un serpent [VW I, 15 : Tethgonus].
§ 7. Ayant reçu la prêtrise, Guénolé envisage une retraite avec quelques compagnons sur une île [l’édition de 1659, sans signaler l’interpolation, précise qu’il s’agit de l’île de Sein] ; mais cette expérience se révèle un échec et ils retournent sur le continent en marchant miraculeusement sur les flots [VW II, 4]. Ayant constaté que l’ermitage de Corentin est vide, Guénolé se rend à Quimper où son maître a été requis par le roi et les Etats de s’asseoir sur le siège épiscopal fondé par Gradlon et d’aller chercher en conséquence la bénédiction de Martin [emprunt à la vita de Corentin].
§ 8. Accompagnés de deux seigneurs laïques, Corentin, Guénolé, Jacut et Tugdin se rendent à Tours, où le premier reçoit la consécration épiscopale et se voir confirmer par Martin le droit de bénir les abbés de son diocèse : ainsi, de retour en Cornouaille, Guénolé est-il bénit et désigné par Corentin comme abbé de Landévennec [emprunt à la vita de Corentin].
§ 9. De la ville d’Is où il a installé sa cour après avoir délaissé Quimper à Corentin, Gradlon vient souvent à Landévennec visiter Guénolé, à qui « il donna son chasteau de Tevennec en la paroisse d’Argol », ainsi que les biens afférents ; de passage à Quimper avec quelques-uns de ses religieux, Guénolé est sollicité par Guénaël qui veut devenir l’un d’entre eux et le suit au monastère [emprunt à la vita de Guénaël].
§ 10.  Une de ses sœurs [Wrdisten rapporte son nom, Chreirbia, et indique expressément qu’elle était l’unique sœur du saint] ayant été éborgnée par une oie dans la cour du château paternel, Guénolé, prévenu de l’accident, obtient sa guérison miraculeuse [VW I, 14] ; il fait jaillir une source abondante à l’intérieur même du cloître de son monastère pour le confort de ses frères [VW II, 7].
§ 11. Guénolé est gratifié d’une vision miraculeuse de Patrice, avec qui il a un long entretien [VW I, 19] ; en butte aux moqueries d’un garnement qui lui dit qu’il préférerait son argent à ses paroles, il rend la vue à un aveugle [VW I, 11].
§ 12.  Guénolé prêche souvent les habitants de la ville d’Is où il va visiter Gradlon et sauve ce dernier de la terrible punition infligée à la population ; le roi se réfugie alors à Quimper.
§ 13. Gradlon, cassé de vieillesse, meurt en 405 et, selon sa volonté, son corps est porté à Landévennec pour y être inhumé au terme de funérailles célébrées par « Guénégal » : l’oraison funèbre est prononcée par Guénolé. Tombeau et épitaphe de Gradlon ; services à sa mémoire encore chantés à l’époque du Père Albert dans l’oratoire qui renferme sa sépulture par les paroisses voisines de l’abbaye. Guénolé à Quimper pour les Etats du royaume et le couronnement de Salomon ; retour à Landévennec.
§ 14. En butte à la persécution du Démon sous la forme de bêtes sauvages [VW II, 8], Guénolé, manifestant à cette occasion sa dimension ubiquitaire, fait bénéficier de sa grâce un berger et ses brebis qu’il délivre de deux périls consécutifs : un terrible orage et une meute de loups [VW I, 16].
§ 15. Trois voleurs, qui s’en étaient pris aux marchandises gardées dans le grenier de l’abbaye, sont les victimes de châtiments divins, dont Guénolé les délivre après avoir reçu l’assurance de  leur contrition ; convertis, ceux-ci restent attachés au service du monastère [VW II, 23-24-(25)]. La mère du moine Riokus [ce dernier explicitement distingué par le Père Albert du saint qui fait l’objet d’une notice particulière à la date du 12 février] est ressuscitée par l’aspersion d’une eau qui avait été préalablement bénite par le saint abbé [VW II, 22 : Riocus (cf. II, 18)].
§ 16. Guénolé est gratifié d’une vision céleste [VW II, 26] ; il guérit la cécité d’une demoiselle fort pieuse, elle-même bénéficiaire d’une vision angélique et venue chercher la bénédiction du saint à Landévennec [VW II, 27].
§ 17. Le moment de sa mort lui ayant été révélé par un ange, Guénolé désigne celui [Guénaël] qui doit lui succéder [VW II, 28] et meurt après avoir célébré la messe [VW II, 29].
§ 18. Son corps, lavé et paré, est exposé à la vénération dans l’église abbatiale, avant d’être « mis en un coffret ou charnier de pierre, eslevé sur des pillastres de deux piés et demy de hauteur, contre le paroy de la chappelle qui fait l’aisle gauche de la croisée de l’Eglise de Land-Tevennec », église auparavant dédiée à Notre-Dame et depuis sous l’invocation de saint Guénolé. Nombreux sanctuaires en Bretagne ; patronage paroissial à Concarneau et au Croisic.
§ 19. Portrait physique et moral de Guénolé [VW II, 9-12].


[1] « La fin que je me propose n'est autre que l'honneur de Dieu, la gloire de ses Saints, vostre utilité et edification, et la confusion des ennemis de l'Eglise. Vous y pourrez trouver des modeles de Sainteté, sur lesquels former vos actions, de quelque estat et condition que vous soyez : tant de Saints Prelats, Prestres, Moynes, Hermites, Roys, Princes, Juges, Laboureurs, Vierges et mariés, de tout aage et sexe. Vous y trouverez, comme dans un Arsenal bien muny, des armes, tant offensives que deffensives, pour rembarrer les ennemis de la vérité. La succession legitime et continuée des Evesques, depuis le premier siecle jusques à nos jours, que Tertullien met pour une marque de la vraye Eglise ; la celebration du Sainct Sacrifice de la Messe par le laps de quinze siecles et plus, sans discontinuation. Une ferme et indubitable croyance du Tres-Auguste Sacrement de l'Autel, l'invocation de la Mere de Dieu et des Saints,  l'usage des Ceremonies, des Litanies, Rogations et autres prieres ; la veneration des Temples et des Reliques, la verité des Miracles, et surtout une prompte et filiale obeyssance au saint Siege Apostolique et aux Papes Vicaires de Jésus Christ en terre ; en un mot, un Antidote tres prompt contre le poison des Heresies , dont ce siècle est corrompu. Voilà de quoy je vous fais présent (cher Lecteur), vous suppliant l'agréer… » (A. Le Grand, Avertissement à La vie, gestes, mort et miracles des saincts de la Bretaigne armorique, ensemble un ample catalogue chronologique et historique des Evesques des neuf Eveschez d'icelle, accompagné d'un bref récit des plus remarquables Evenements arrivez de leur temps, Fondations d'Eglises et Monasteres, Blazons de leurs armes, et autres curieuses recherches. Enrichi d'une Table des matières, et succinte Topographie  des lieux remarquables y mentionnez, Nantes, 1637. Sauf indication contraire, c’est à cette édition que nous nous référons dans cet article).
[2] Le jugement de Dom Lobineau sur l’ouvrage du P. Albert est sans appel : « un tissu de fables, plus propres à réjouir les libertins, qu'à édifier les fidelles » (Préface à son Histoire de Bretagne, t. 1, Paris, 1707).
[3] B. Pocquet du Haut-Jussé, Continuation de l’Histoire de Bretagne d’A. de la Borderie, t. 5, Rennes, 1913, p. 620 : « Ce n'est pas un historien. Il manque totalement de critique et pousse la crédulité jusqu'à la naïveté. Il dédaigne la chronologie, il mêle les personnages et les dates, il raconte sans sourciller les belles actions de Conan Mériadec et de saint Riothime, qui n'ont pas plus existé l'un que l'autre ».
[4] Extrait d’une lettre adressée à H. Waquet, 26 mars 1927 : « La Villemarqué et Albert Le Grand sont les ancêtres des historiens ou faiseurs d’histoire de Bretagne ; ils étaient tous les deux atteints d’un vilain mal : prétendre s’appuyer sur des documents qu’ils modifiaient ou falsifiaient. Cette tare a passé dans le sang de leurs descendants » [cité par J. Charpy, « Les archivistes bretons face à leur temps », Kreiz 4, Études sur la Bretagne et les Pays Celtiques (1995) p. 71].
[5] D. Aupest, « Méthodes de travail d'Albert Le Grand, hagiographe breton », Bulletin philologique et historique (jusqu'à 1610) du Comité des travaux historiques et scientifiques, année 1966 (Actes du 91e Congrès national des Sociétés savantes tenu à Rennes), volume 2, p. 661-671.
[6] B. Merdrignac, « La transmission des vitae médiévales (perdues) par Albert Le Grand, hagiographe du XVIIe siècle », A. Karlowska-Kamzowa et J. Kowalski, J. [éd.], Bretagne-Pologne. La tradition médiévale aux temps modernes, Poznán, 1997, p. 47-53.
[7] Ph. Lahellec, Approche de la vie et de l’œuvre du fondateur de l’hagiographie bretonne : Albert Le Grand de Morlaix et La Vie des saincts de la Bretaigne armorique (1637), mémoire de maîtrise d’histoire, Brest, Université de Bretagne occidentale, 1996. ; Idem, Albert le Grand de Morlaix : sources et méthode. Étude de La Providence de Dieu sur les justes en l’histoire admirable de saint Budoc archevesque de Dol (1640), mémoire de DEA d’histoire, Brest, Université de Bretagne occidentale, 1997.
[8] Nous empruntons les éléments de ce résumé assez sec aux passionnantes recherches menées par Ph. Lahellec dans le cadre de son mémoire de maîtrise (1996)
[9] Ibidem.
[10] P. Le Baud, Chroniques et Ystoires des Bretons, livre 3, édition [partielle] par Ch. de la Lande de Calan, t. 2, Nantes, 1910, p. 17.
[11] Ms Paris, BnF, lat. 9746, f. 79v. Cette copie a été effectuée au XVIe siècle : elle est donc postérieure à l’époque où a vécu P. Le Baud ; mais  A. Ramé, « Rapport sur le cartulaire de Landévennec », Bulletin philologique et historique du Comité des Travaux historiques et scientifiques, 1882, p. 420, admet l’existence d’une copie intermédiaire datée 1436. Cette hypothèse, comme le signale J.-C. Poulin, L'hagiographie bretonne du Haut Moyen Âge. Répertoire raisonné, Ostfildern, 2009 (Beihefte der Francia, 69), p. 410, a été développée « sans doute sur la foi d’une mention ajoutée à la fin de l’acte 39 du cartulaire, au fol. 76v, mais absente du ms. de Quimper : Anno Domini  millessimo (sic) CCCC.XXX.VI ».
[12] Une allusion à cette tradition figure dans le texte intitulé « Quinze août », Revue de l’Armorique et de l’Ouest, t. 1 (1842), p. 4. L’auteur anonyme prend d’ailleurs bien soin d’avertir en note que « dans cette esquisse historique du culte de la Sainte Vierge en Bretagne, on a cité Albert Le Grand moins comme un historien que comme un auteur admirable par sa piété envers Marie ». Cette esquisse a été par la suite paraphrasée – auto-paraphrasée ? – et considérablement amplifié par l’auteur de Notre-Dame de France ou Histoire du culte de la sainte Vierge en France, t. 4, Paris, 1864, p. 435 et suivantes ; l’écrivain qui se désigne modestement sous sa seule qualité de « curé de Saint-Sulpice » est l’abbé André-Jean-Marie Hamon (1795-1874).
[13] F. Duine, Memento des sources hagiographiques de l’histoire de Bretagne. Première partie : les Fondateurs et les primitifs du Ve  au Xe  siècle, Rennes, 1918, p. 12.
[14] A. Le Grand, La vie, gestes, mort et miracles des saincts de la Bretaigne armorique, p. 712.
[15] M. Simon, « Echos d’histoire bretonne à  Landévennec au IXe siècle », Chronique de Landévennec 48 (2e série, octobre 1986), p. 105-111.
[16] Idem, L’abbaye de Landévennec de saint Guénolé à nos jours, Rennes, 1985, p. 80-82.
[17] J. Quaghebeur, La Cornouaille du IXe au XIIe  siècle. Mémoire, pouvoirs, noblesse (Publications de la Société archéologique du Finistère), s.l. [Quimper], 2001.
[18] Ibidem, p. 39-51.
[19] J. -C. Cassard, « la mise en texte du passé par les hagiographes de Landévennec au IXe siècle », Bulletin de la Société archéologique du Finistère, t. 122 (1993), p. 361-386.
[20] Ibidem, p. 364.
[21] Ibid., p. 381-382.
[22] J. Quaghebeur, La Cornouaille du IXe au XIIe  siècle…, p. 65.
[23] Ibidem, p. 43-44.
[24] A. Le Grand, La vie, gestes, mort et miracles des saincts de la Bretaigne armorique, p. 712.
[25] A. Croix [dir.], La Bretagne d’après l’Itinéraire de monsieur Dubuisson-Aubenay, Rennes, 2006, p. 378-388.
[26]A. Le Grand, La vie, gestes, mort et miracles des saincts de la Bretaigne armorique, p. 711.
[27] Nous sommes tenté de corriger et de comprendre comme suit les trois premiers vers : « Rom’ au Pape donna l’empereur Constantin/Sa terre aussi livra tout’ à S. Corentin/Grallon Roy Chestien des Bretons armoriques ».
[28] L’orthographe Landt-Tevenec est celle du Père Albert.
[29] A. Le Grand, La vie, gestes, mort et miracles des saincts de la Bretaigne armorique (De exequiis Regis Gradlonis fundatoris nostri), p. 712-713 : Erant cum GVENNUCO Episcopo Pontificante, VVinvvaloeus Abbas de Landt-Teguennok, & Haëmo eiusdem Castelli Prior : Gildas Abbas Rhuiti, & Halcuin ejusdem loci Prior, hi duo Abbates : Monachi Iacut, Daniel, Biabilius, Martinus, Guennaël, Bili, & alii plurimi. Halcun Presbyter de Arcol, Perceval Presbyter Din heaul, Sacerdotes Yvo, Melchun, Israël, Ilion, Inizan, Tyrizianus, Gaufredus, Rivallon, Alfredus, & alii plurimi. Cum Salomone Rege & Adevisia Regina, Laïci, Hameus Vicecomes, Inizan Vicecomes, Eudo Matibernus, Ioz Vicecomes, Fracanus consul de Leonia, Tugdonus consul de Goëlovia, & alii plurimi.
[30] Ibidem, p. 753 : « ADEVISIA, fut femme de ce Prince, MSS Cod Landevenec ».
[31] Nous reviendrons sur ces questions dans un travail en cours sur « Forgeries monastiques en Bretagne au Moyen Âge et à l’époque moderne ».
[32] M. Simon, L’abbaye de Landévennec…, p. 115.
[33] C.E. Jordan, Histoire de la vie et des ouvrages de Mr La Croze (Première Partie), Amsterdam, 1741, p. 8.
[34] A.A. Bruzen de La Martinière (éd.), Lettres choisies de M. Simon, t. 4, Amsterdam, 1730, p. 253.
[35] M. Simon, L’abbaye de Landévennec…, p. 131.
[36] A. de la Borderie (éd.), Correspondance historique des Bénédictins bretons, p 69 (lettre de Dom Audren de Kerdrel à R. de Gaignières, 18 décembre 1695).
[37] R.F. Le Men et E. Ernault (éd.), « Cartulaire de Landévennec » (préface par H. d’Arbois de Jubainville), Mélanges historiques, t. 5, Paris, 1886 (Collection de documents inédits sur l’histoire de France) p. 561 (n° 24), 571 (n° 42), 574 (n° 47, n° 48), 575 (n° 51). Cette publication demeure pour l’instant l’édition de référence ; cependant elle doit être impérativement complétée, notamment pour la partie hagiographique dont elle est malheureusement déficitaire, au moyen de l’édition donnée par A. de la Borderie, Cartulaire de l’abbaye de Landévennec, 1e livraison : texte du cartulaire, avec notes et variantes, Rennes, 1888.
[38] J.-L. Deuffic, Inventaire des livres liturgiques de Bretagne. Livres d’heures, de piété, de dévotion et ouvrages associés, antérieurs à 1790, Saint-Denis, 2014 (ouvrage disponible sous forme numérique), p. 225, notice n° 231.
[39] Ms Paris, BNF, 22337, fol. 55r.
[40]  R.F. Le Men et E. Ernault (éd.), « Cartulaire de Landévennec », p. 565 (n° 29).
[41] J.-L. Deuffic, Inventaire des livres liturgiques de Bretagne, p. 225 : « VI id. Feb. In Britannia minori, monasterio Landoato [sic, pour Landoaco], depositio beatissimi Jacuti, confessoris et abbatis, fratris s. Wingualoei » ; « III Nonas Julii, in Britannia minori, SS. Confessorum Jacuti et Guethenoci, fratrum S. Wingualoei » (Extraits faits par Dom Mars).
[42] Ibidem : « IV Non. Julii, S. Balai, confessoris ». Voir à ce sujet A.-Y. Bourgès, « Saint Balai/Valai et les relations entre les abbayes de Landévennec et de Saint-Jacut-de-l’île », Hagio-historiographie médiévale (2007) en ligne (consulté le 22 juin 2014) :
[43] Introduction facilitée par l’homophonie entre le nom de Jacut et celui du frère de Guénolé, Jacques (Jacob).
[44] R.F. Le Men et E. Ernault (éd.), « Cartulaire de Landévennec », p. 551 (n° 1).
[45] Ibidem, p. 568 (n° 39).
[46]A. Le Grand, La vie, gestes, mort et miracles des saincts de la Bretaigne armorique, p. 713.
[47] J. Geslin de Bourgogne et A. de Barthélemy, Anciens évêchés de Bretagne, t. 3, 1e partie, Paris-Saint-Brieuc, 1864,  p. 46.
[48] Ibidem, t. 3,  2nde partie, p. 104.
[49] Ibid,  t. 4, p. 278.
[50] B. Tanguy, Dictionnaire des noms de communes, trèves et paroisses des Côtes d’Armor, s.l. [Douarnenez], 1992, p. 204, écrit prudemment au sujet de l’éponyme de Ploubalay : « En dépit de l’homonymie, on ne saurait affirmer que ce saint est le même personnage que saint Balai, confesseur honoré à l’abbaye de Landévennec (Fin.) » ; ce qui ne signifie pas qu’une telle hypothèse ne puisse être formulée.
[51] R.F. Le Men et E. Ernault (éd.), « Cartulaire de Landévennec », p. 553-554.
[52] Ibidem, p. 556 (n° 14).
[53] Dom H. Morice, Mémoires pour servir de preuves à l’histoire… de Bretagne, t. 1, Paris, 1742, col. 177-178.
[54] Ms Quimper, BM, 16.
[55] Voir supra n. 11.
[56] Dom N. Mars dans son « Histoire de l’abbaye de Landévennec » (en latin), publiée par F. Jourdan de la Passardière, Bulletin diocésain d'histoire et d'archéologie, vol. 12 (1912), passim, évoque parmi ses sources, outre le « cartulaire » (cartularium) de l’abbaye (p. 228), des « parchemins » qu’il qualifie (p. 129)  « anciens » (in antiquis membranis) ; il mentionne également le « chartrier » (chartarium) du monastère (p. 134). F. Jourdan de la Passardière fait en outre remarquer (p. 130, n. 1) que, d’après les extraits qu’il en cite, Dom Mars a eu accès à  la vita de Guénolé par Wrdisten au travers d’une version qui n’était pas celle du ms Quimper, BM, 16, et dont certaines leçons se retrouvent dans le texte du ms Paris, BnF, 5610 A ; mais ce dernier avait quitté Landévennec au plus tard au XIIIe siècle, avant de passer au siècle suivant dans la bibliothèque du chapitre de Notre-Dame de Paris.
[57] Voir en annexe notre analyse de cette notice et le relevé de ses concordances avec la vita composée par Wrdisten.
[58] F. Duine, Memento des sources hagiographiques, p. 105, donne à voir, à propos de l’hagiographie de Suliau, une belle démonstration de ce savoir-faire littéraire particulier du Père Albert.
[59] A.-Y. Bourgès, « Saint Goulven à Bouvines : à nouveau Guillaume le Breton et l'hagiographie bretonne »,  J.-C. Cassard (+), P.-Y. Lambert, J.-M. Picard et B. Yeurc'h (dir.), Mélanges offerts au professeur Bernard Merdrignac, 2013, p. 75-81 (Britannia monastica, 17), en ligne (consulté le 22 juin 2014):https://www.academia.edu/6502180/Saint_Goulven_a_Bouvines_a_nouveau_Guillaume_le_Breton_et_lhagiographie_bretonne.
[60] Concernant les traditions relatives à Ys,  A. Le Grand a  eu accès au manuscrit de la seconde version de l’ouvrage de Le Baud, publiée par P. D’Hozier sous le titre Histoire de Bretagne, avec les chroniques des maisons de Vitré, et de Laval par Pierre Le Baud, chantre et chanoine de l'eglise collegiale de Nostre-Dame de Laval, tresorier de la Magdelene de Vitré, conseiller & aumosnier d'Anne de Bretagne reine de France. Ensemble quelques autres traictez servans à la mesme histoire. Et un recueil armorial contenant par ordre alphabetique les armes & blazons de plusieurs anciennes maisons de Bretagne. Comme aussi le nombre des duchez, principautez, marquisats, & comtez de cette province. Le tout nouvellement mis en lumiere, tiré de la bibliotheque de monseigneur le marquis de Molac, & à luy dedié, Paris, 1638 (voir en particulier p. 15 et 45-46).
[61] B. D’Argentré, L'histoire de Bretagne, des rois, ducs, comtes et princes d'icelle. L'établissement du royaume, mutation de ce titre en duché continué jusques au temps de Madame Anne, dernière duchesse par le mariage de laquelle passa le duché en la maison de France.‎, Paris, 1588, f. 86-86 v°.
[62] M. Moreau, Histoire de ce qui s’est passé en Bretagne durant les guerres de la Ligue et particulièrement dans le diocèse de Cornouaille, édition par A. Le Bastard de Mesmeur (en religion soeur Anne de Jésus), Brest, 1836, p. 9-11.
[63] F. Le Roux et C.-J. Guyonvarc’h, La Légende de la ville d’Ys, Rennes, 2000.
[64] Un carme de Saint-Pol-de-Léon, Alain Perrot, en religion frère Bernard du Saint-Esprit, a fait paraître en 1651 à Morlaix un ouvrage contenant deux traités en langue bretonne : le premier, consacré à la vie merveilleuse et à la mort bienheureuse de saint Guénolé, décrit ce dernier comme « originaire du Léon » (guinidic a escopty Leon) ; le second, intitulé en français « De la guerre qui fut entre les Chrétiens et les Barbares en la paroisse de Guizesny en Léon, de laquelle fut obtenue la victoire par les mérites et intercession de saint Guénolé », souligne le rôle du saint durant la bataille. L’ouvrage en question demeurant introuvable malgré les recherches déployées par des spécialistes expérimentés, notamment le regretté Gwennolé Le Men, il est impossible de savoir dans quelle mesure Bernard du Saint-Esprit s’était inspiré de la notice du Père Albert.
[65] A. de la Borderie, Cartulaire de l’abbaye de Landévennec, p. 179 (n° 69).
[66] R. Latouche, Mélanges d’histoire de Cornouaille, Paris, 1911, p. 28, n. 5.
[67] H. Bourde de la Rogerie, « Chronique d’histoire et de littérature de la Bretagne », Annales de Bretagne, t. 24 (1908), n° 3, p. 429-430.
[68] F. Jourdan de la Passardière, « Topologie des paroisses du Léon », Revue de Bretagne, t. 45 (1911), p. 284-285.
[69] A.-Y. Bourgès, « Autour du Conte du Franklin : Chaucer et la Bretagne», Hagio-historiographie médiévale (2008), en ligne (consulté le 22 juin 2014) : http://hagio-historiographie-medievale.org/2008/02/autour-du-conte-du-franklin-chaucer-et.html.
[70] B. Tanguy, « Les noms de lieux dans le cartulaire de Landévennec », Landévennec et le monachisme breton dans le Haut-Moyen Âge. Actes du colloque du XVe centenaire de l’abbaye de Landévennec 25-26-27 avril 1985, Landévennec, 1986, p. 150.
[71] A.-Y. Bourgès, «  Deux traditions médiévales de Landévennec transplantées en Léon : (I) la légende mariale de Salaün », Hagio-historiographie médiévale (2014), en ligne (consulté le 22 juin 2014) :
[72] A. Le Grand, La vie, gestes, mort et miracles des saincts de la Bretaigne armorique, p. 53 :  en 1624, parcourant Plouzané à la recherche des vestiges laissés par le saint éponyme,  il note la présence, en sortant de l’église, à gauche du porche, d’ « une grande Croix de grain, avec quelques caracteres incogneus, lesquels, si on pouvoit lire, nous esclairciroient beaucoup ceste matiere ».
[73] J.-F. Simon, La structuration de l'espace plouzanéen, en Basse-Bretagne : dynamique d'un paysage, usages, représentations, Brest, 1993, p. 27-32 ; Idem, « Retour sur le Tro ar C'hloastr (ou Tro sant Sane) : la "Troménie" de Plouzané (Finistère) », F. Postic [éd.], Bretagnes. Du coeur aux lèvres. Mélanges offerts à Donatien Laurent, Rennes, 2009, p. 339-355 ; J. Hascoët, Les troménies bretonnes. Un mode d'anthropisation de l'espace à l'examen des processions giratoires françaises et belges, thèse de doctorat, t. 1, Brest, 2010, p. 183-191.
[74] P. Le Baud, Chroniques et Ystoires des Bretons, livre 3, éd. Calan, t. 2, p. 23 ; B. D’Argentré, L’histoire de Bretagne, f. 86 ; M. Moreau, Histoire de ce qui s’est passé en Bretagne…, p. 11.
[75] A. Bardel et R. Perennec, « Abbaye de Landévennec : évolution du contexte funéraire depuis le haut Moyen Âge », A. Alduc-Le Bagousse (éd.), Inhumations et édifices religieux au Moyen Âge entre Loire et Seine, Caen, 2004 (Table ronde du CRAHM, n°1), p. 138.
[76]A. Le Grand, La vie, gestes, mort et miracles des saincts de la Bretaigne armorique, p. 49.
[77] Ph. Guigon, Les sépultures du haut Moyen âge en Bretagne, s.l. [Rennes], 1994, p. 45.
[78] Dom N. Mars, « Histoire de l’abbaye de Landévennec », p. 232.
[79] A. Bardel et R. Perennec, « Abbaye de Landévennec : évolution du contexte funéraire… », p. 149.
[80] V. Debiais, « Afficher pour convaincre: la construction et la promotion de la mémoire dans les inscriptions comme instrument de la propagande médiévale », Afficher pour convaincre: quatre tables rondes, Fontevraud (octobre 2004), Oxford (septembre 2005), Barcelone (juin 2006) Saintes (novembre 2006), en ligne (consulté le 22 juin 2014) :
[81] A. Bardel, « L’abbaye Saint-Gwenolé de Landévennec », Archéologie médiévale, vol. 21 (1991), p. 77.
[82] Dom N. Mars, « Histoire de l’abbaye de Landévennec », p. 232 : « Grallo fundator etiam lapideo gaudet tumulo cui epitaphia duo recentioris aetatis et quae vitae ejus epocham falso repraesentant sunt apposita ».
[83] V. Debiais, « Afficher pour convaincre… ».
[84]A. Le Grand, La vie, gestes, mort et miracles des saincts de la Bretaigne armorique, p. 257.

Aucun commentaire:

Printfriendly