"L’Histoire (du Moyen Âge) est un sport de combat, parce que l’Histoire, et au-delà les sciences humaines, est menacée par la posture utilitariste dominante dans notre société, pour laquelle seul ce qui est économiquement et immédiatement rentable est légitime : le reste n’est que gaspillage de temps et de deniers publics. Dans cette situation, l’Histoire médiévale est dans une situation paradoxale puisque s’ajoute à ce déficit général de légitimité des sciences humaines un détournement généralisé du Moyen Âge à des fins variées, jouant tantôt sur le caractère irrationnel et sauvage prêté à la période, tantôt sur la valeur particulière des « racines » médiévales. Le Moyen Âge devient ainsi un réservoir de formules qui servent à persuader nos contemporains d’agir de telle ou telle manière, mais n’ont rien à voir avec une connaissance effective de l’Histoire médiévale." J. MORSEL, L'Histoire (du Moyen Âge) est un sport de combat...

01 février 2024

Quelques observations sur le dossier hagiographique de Martin, fondateur du monastère de Vertou, et sur la destruction de cet établissement par les Normands

[La présente notule est une contribution à l’étude du matériau littéraire médiéval consacré aux saints du Nantais : elle concerne en effet le dossier hagiographique d’un personnage dont la principale fondation était située dans une paroisse de la partie ultra-ligérienne du diocèse de Nantes. Ce dossier a fait l’objet, depuis une quarantaine d’années, de mises à jour très importantes :  celles-ci sont, pour l’essentiel, en relation avec le renouveau d’attention portée à Létald de Micy dans le prolongement des travaux de Thomas Head[1], brillant chercheur américain enlevé trop tôt aux études hagiologiques[2]. Létald, personnage fascinant à bien des égards[3], est en effet considéré comme l’auteur du principal ouvrage consacré à Martin de Vertou[4] ; mais les différentes actualisations relatives à cet écrivain et à son œuvre, en particulier les apports des travaux menés et encadrés à l'École pratique des hautes études par Anne-Marie Turcan-Verkerk, mériteraient d’être mieux connus[5] : en effet, le grand public cultivé en est parfois resté à l’appréciation un peu sévère portée par Georges Pon[6] avant le renouveau dont nous avons parlé et qu’il convient en conséquence de nuancer. Par ailleurs, la destruction du monastère de Vertou par les Normands, principalement documentée par l’ouvrage de Létald, pose une nouvelle fois la question de la fiabilité des sources hagiographiques. Nous avions rapidement fait part, dans un précédent travail sur « Les Vikings dans l’hagiographie bretonne »[7], de nos premières conclusions sur les circonstances de cet événement dramatique[8] : voici venu le moment de procéder à cet examen un peu plus approfondi que nous avions alors inscrit au nombre de nos tâches futures[9]].

 

I

Le nombre de pièces, répertoriées dans la BHL, qui constituent le dossier hagiographique du fondateur de Vertou n’a pas varié : elles sont au nombre de quatre, sans parler d’une hymne qui fait le résumé de miracles anthumes obtenus par Martin ; mais, depuis l’époque de la publication de ces différents textes par Mabillon puis par les Bollandistes, leur datation respective et conséquemment leur classement chronologique ont été reconsidérés. La vie du saint [BHL 5667], le recueil de ses miracles et le récit de la translation de ses reliques [BHL 5668] forment un ensemble qui est désormais placé en tête de série : sa date de composition se situe autour de l’An Mil, si du moins on accepte son attribution à Létald[10] ; les deux autres pièces du dossier [BHL 5669 et BHL 5670] s’avèrent quant à elles largement dépendantes de l’ouvrage en question et lui sont donc postérieures, peut-être même du XVe siècle s’agissant du texte BHL 5670[11]. Sans négliger l’apport de ces productions hagiographiques secondaires et tardives, leur dépendance suggère de les considérer plutôt comme les marqueurs d’une volonté de maintenir un courant de dévotion à l’endroit du saint concerné, alors même que son culte a toujours connu une forte compétition avec celui de l’Apôtre des Gaules : on en a la preuve dans le récit d’un miracle qui, de surcroît, évoque la concurrence d’un troisième saint homonyme honoré à Saujon[12]. Au demeurant, les saints Martin paraissent avoir été assez nombreux en Occident, durant l’Antiquité tardive et le Haut Moyen Âge[13] ; mais c’est avec la geste du fondateur de Marmoutier que celle de Martin de Vertou présente le plus de ressemblances : on peut en déduire que plusieurs traditions relatives à ce dernier ont été empruntées au dossier du saint évêque de Tours.

Par ailleurs, la vita de Martin par Létald entérine « l'extension du ressort politique et religieux du Nantais au Sud de la Loire », consécutive à la mainmise bretonne intervenue à partir du milieu du IXe siècle et qui a connu ses ultimes développements au second tiers du Xe siècle[14] : l’hagiographe, évoquant la présence au monastère de Vertou d’un if, prolongement miraculeux du bâton abbatial planté en terre par Martin, indique que,

« … lorsqu’ils arrivent sur place, les chefs bretons, sous l’autorité desquels est cette région, se rendent d'abord à l'arbre et adorent le Christ, puis entrent dans l'église. Ce que le roi Alain avait l’habitude de faire et il disait que c’était la coutume de ses ancêtres. Cette espèce d’arbre convient à la fabrication de flèches et d’arcs ; on l'appelle vulgairement if »[15].

Le « roi Alain » (rex Alanus) dont il est ici question doit être identifié avec Alain le Grand (mort en 907), réputé le dernier roi de Bretagne et grand père du duc Alain Barbetorte (mort en 952), à qui l’on attribue d’avoir recouvré le pouvoir dans la péninsule après l’intermède viking.

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Létald donne à l’extension territoriale du Nantais des origines plus anciennes et distinctes de l’expansion bretonne : il en attribue en effet l’initiative à l’évêque Félix (mort en 582), prélat prestigieux, dont le souvenir restait attaché à l’établissement d’une « nouvelle Rome » à Nantes[16]. Félix aurait chargé Martin, son principal collaborateur, d’évangéliser le sud-Loire : en plus de Vertou, Martin aurait également fondé une communauté double à Durivum/Durinum (Saint-Georges-de-Montaigu)[17] ; son apostolat se serait en outre étendu à Herbadilla, ville (éponyme ?) du pays d’Herbauge, engloutie sous les eaux en punition de l’immoralité de ses habitants. Différentes localisations pour cette ville disparue ont été proposées par les érudits en fonction des ambitions territoriales qu’ils prêtaient aux prélats nantais : si, comme on le voit sous la plume de Le Baud, puis celle de D’Argentré, la tradition privilégie, depuis la fin du XVe siècle au moins, l’emplacement du lac de Grandlieu, certains auteurs ont par exemple suggéré, sans plus de certitude, les actuelles communes vendéennes de Jard-sur-Mer ou Saint-Vincent-sur-Jard, à cause de leur situation au bord de l’Océan, ou bien, au contraire, à l’intérieur des terres, Les Herbiers, sur la base cette fois d’une vague homophonie. En réalité, l’épisode consiste en un démarquage, au demeurant revendiqué de manière explicite par l’hagiographe, de l’épisode biblique relatif à la destruction de Sodome et au destin de la femme de Loth : il ne saurait donc être question d’y chercher le souvenir d’un quelconque événement historique, du moins sous la forme qui en est présentée ; mais l’anecdote a beaucoup nourri l’imagination du public, presque autant que dans le cas de la ville d’Ys, en Basse-Bretagne, et, par le biais d’un acte faux daté 1387, elle a même fait l’objet d’un véritable « recyclage » à usage politique et économique quand il s’est agi pour certains puissants barons locaux de revendiquer la propriété du lac de Grandlieu[18].

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A l’époque où Létald a composé son ouvrage, les successeurs d’Alain Barbetorte avaient déjà cédé du terrain au profit de leurs puissants voisins, les comtes d’Anjou et le territoire où s’exerçait l’autorité des évêques de Nantes au sud de la Loire se trouva bientôt réduit à l’Herbauge septentrionale et à une petite partie du pagus de Tiffauges[19] ; mais il ne semble pas que Létald se soit beaucoup soucié de la politique territoriale des évêques de Nantes[20] et moins encore de celle des princes bretons[21]. En tout état de cause, il parait même avoir plutôt nourri de l’antipathie à l’égard de ces derniers, si du moins la diatribe rimée contre les exactions (supposées) de Nominoë et de ses troupes au Mont-Glonne est bien sortie de sa plume[22] ; de même, dans son récit des miracles de Martin, dénonce-t-il la crainte que les Bretons faisaient régner parmi les habitants de Thouars[23].  En fait, l’ensemble de l’ouvrage que Létald a consacré à Martin, vita et miracula, est avant tout destiné à magnifier un personnage assez largement victime, comme on l’a dit, de son homonymie avec l’apôtre des Gaules ; et, à l’instar de ses autres compositions, – notre écrivain a répondu en l’occurrence à une commande spécifique : celle que lui avaient passée les moines d’Ension (Saint-Jouin-de-Marnes), détenteurs de reliques de Martin en provenance de Vertou, et dont il adopte le point de vue, comme s’il avait été lui-même membre de cette communauté[24]. Il s’agissait avant tout pour Létald de satisfaire ses commanditaires en inscrivant cet autre patron de leur monastère dans la familiarité d’un prélat qui, à l’époque mérovingienne, avait joui d’une très grande notoriété : certes, à la suite au rattachement ultérieur du Nantais à la Bretagne, le siège occupé jadis par Félix se trouva désormais intégré au réseau des évêchés du duché ; mais le récit ne présente aucune dimension spécifiquement bretonne, voire celtique[25] et d’ailleurs Létald localise Nantes, supposée ville natale de Martin, en Neustrie[26].

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L’ouvrage peut aussi bien se lire comme un manifeste à l’encontre des visées expansionnistes des Angevins, qui s’avéraient fort dommageables pour les protégés ou alliés du comte de Blois, dont faisaient partie les moines de Micy[27] : au Mont-Glonne, – où les moines de Saint-Florent étaient pendant longtemps parvenus à pratiquer entre les évêques de Nantes et de Poitiers une politique d’équilibre et d’arbitrage qui leur avait finalement permis de s’affranchir de la tutelle de l’ordinaire, – le comte d’Anjou, Foulque Nerra, devait finalement imposer sa mainmise, tout en contribuant à renforcer sur place le contrôle des évêques d’Angers[28]. Dans le recueil des miracles de Martin, une anecdote porte condamnation de l’attitude de ces princes qui cherchent à s’approprier une partie substantielle des revenus des sanctuaires monastiques[29] ; mais, afin de se livrer sans risques à sa dénonciation en règle des agissements du comte d’Anjou et de ses satellites en la matière, Létald utilise le ressort d’une anecdote dont il situe prudemment les développements sous le règne de Dagobert[30]. De même, comme le préconisait Head à propos des Versiculi de eversione monasterii Sancti Florentii, peut-être faut-il « voir dans le récit un peu fantaisiste de la résistance des moines face aux Bretons vers 850 une façon voilée d’exalter la résistance de Saumur face aux Angevins »[31].

 

II

Ces éléments de contexte étant rappelés, examinons  comment, au-delà d’un indéniable talent littéraire depuis longtemps remarqué et reconnu, y compris par ceux qui lui ont reproché de le gâcher[32], Létald a également fait preuve d’un véritable savoir-faire d’écrivain, notamment au point de vue historiographique[33], c’est-à-dire une « manière » qui lui est propre, associée à une « méthodologie »[34], qui se retrouve quasiment à l’identique dans plusieurs textes : ainsi les ouvrages consacrés à Martin de Vertou et à Eusice [BHL 2754 et 2756] présentent-ils une parenté formelle avec celui qui traite de Mesmin de Micy [BHL 5820][35]. Rendant compte du travail de Claire Tignolet « sur Micy à l’époque carolingienne, sur les vies de Mesmin antérieures à celle de Létald, qui utilise essentiellement la vita anonyme, et sur le processus de rattachement de différents saints à Micy », Turcan-Verkerk souligne que les Miracula de Mesmin « montrent un intellectuel au travail, remarquable lecteur et critique tant des chartes que des sources hagiographiques » : Létald « fait référence aux livres annotés de son abbaye – sans doute a-t-il fréquenté d’autres bibliothèques voisines – et se montre parfait latiniste, capable de jouer avec subtilité des feuilletages sémantiques du latin de son temps »[36] ; mais c’est surtout la vita de Julien du Mans [BHL 4544], qui a donné à notre auteur l’opportunité de faire la démonstration de sa capacité érudite à discriminer dans sa propre composition [BHL 4546] les sources dont s’était servi son prédécesseur et, plus encore, après les avoir identifiées, d’en souligner le caractère d’emprunt à des textes qui s’avèrent sans rapport aucun avec l’histoire de Julien. Cependant, au terme de sa pertinente critique textuelle, au lieu de trancher dans le sens du rejet total, comme il l’avait pourtant annoncé, Létald, tout en continuant à se réclamer de la vérité historique, cherche des accommodements, sans doute en fonction des souhaits exprimés par son commanditaire, l’évêque Avesgaud : cette ambiguïté nous semble par-dessus tout la marque de Létald ; elle explique que les commentateurs ultérieurs ont pu voir en lui tantôt un hagiographe méticuleux, bien au fait des limites de sa documentation ou, tout au contraire, un écrivain prêt à jouer de ces déficiences documentaires. Au reste ces deux constatations, de notre point de vue, ne sont pas exclusives l’une de l’autre.

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Il s’avère donc assez difficile, pour reprendre la question autrefois posée par Dom Marc Simon, de déterminer si l’œuvre hagiographique de Létald appartient à l’histoire ou plutôt à la fantaisie[37] : peut-être, en effet, au-delà de servir des intérêts bien compris, y a-t-il un plaisir augmenté chez celui qui témoigne d’une véritable érudition historique, à mettre son expertise au service d’une approche plus « fantaisiste » de sources dont il connaît bien les insuffisances ? Sans aller jusqu’à parler de duplicité et basculer ainsi dans le jugement moral, nous sommes  tenté de reconnaître dans cette attitude la démonstration, qui s’observe chez nombre d’hagiographes « professionnels », de leur capacité à adapter leur discours en fonction de l’évolution de leur « marché », comme nous l’avons déjà souligné, par exemple au sujet du traitement hagiographique de la figure du roi Arthur[38]. Dans le cas de Létald, cette « adaptabilité » se serait même traduite, au moment de la composition vers 1004-1011 de la vita de Julien, par son passage avec armes et bagages intellectuels du camp du comte de Blois à celui du comte d’Anjou[39] ; mais cette dernière hypothèse doit être relativisée, comme l’a montré avec finesse Armelle Le Huërou : là encore, en effet, prédomine avant tout la permanence des intérêts de Micy[40]. Enfin, il convient de ne pas oublier, comme le rappelle Marie-Céline Isaia, que

« Les hommes du Moyen Âge n’avaient pas des exigences scientifiques moins hautes que nous : si le public médiéval de l’hagiographie prenait plaisir à entendre des histoires de saints d’autant plus merveilleuses qu’elles étaient improbables, il était en même temps difficile à convaincre, voire incrédule quant au fond de ce qu’on lui rapportait »[41].

En conséquence, les hagiographes devaient recourir à la palette la plus large possible d’effets littéraires, leur permettant de renforcer la vraisemblance de leur propos, – plus particulièrement quand il s’agissait de récits de miracles, à l’instar de ce qu’on observe s’agissant des modernes « messages publicitaires », dont les créateurs cherchent à convaincre le « consommateur » en jouant tout à la fois sur la formulation du « discours » et sur la partie réputée « objective » de son contenu[42]  : il va de soi que des écrivains disposant d’un outillage intellectuel performant et d’un bagage culturel important étaient les mieux à même de donner de la crédibilité à leur propos sans avoir à abuser du seul argument d’autorité ; mais les travaux de Létald se situent à un niveau encore supérieur, sans doute en raison de leur double appartenance  (histoire et fantaisie).

 

III

Les toponymes, les anthroponymes, les titulatures, les termes désignant des fonctions ou des professions, parfois même une date, ou plutôt une tentative de datation, etc., tout cela vient renforcer un effet de réel spécifique aux textes hagiographiques[43]. Si de telles données sont incontestablement précieuses pour l’historien, elles n’en sont pas moins sujettes à discussion, sinon à caution, car leur apparente cohérence résulte avant tout du propos délibéré et du savoir-faire littéraire du narrateur : or, celui-ci ayant déjà procédé au traitement de sa documentation, à laquelle nous n’avons généralement plus d’accès direct, son propre ouvrage ne constitue donc pas véritablement une source, contrairement à ce que l’on pouvait penser autrefois (et même encore naguère) ; ou plutôt, s’il s’agit bien d’une source, elle est de nature moins historique qu’historiographique et permet avant tout d’approcher la manière dont était abordée, à l’époque à laquelle travaillait l’hagiographe, l’ « histoire de l’histoire » du saint. S’il n’y a pas de raison de révoquer systématiquement en doute son existence, sauf bien sûr les cas où l’invention est manifeste[44], il importe de le considérer comme un « saint de papier »[45], dont les différents traits, – certains pouvant avoir été repris à une tradition plus ou moins longue, plus ou moins fiable, – constituent autant de réponses aux attentes, parfois contradictoires, des commanditaires de l’hagiographe ; encore celui-ci  a-t-il pris en compte ces attentes en fonction de sa propre perception des choses. Cette dimension existe aussi dans le cas des textes hagiographiques relatifs aux novi sancti, – les saints de la seconde moitié du Moyen Âge, pour lesquels nous disposons pourtant, en général, d’une documentation plus abondante et plus variée : ainsi le même saint sous la plume de ses différents hagiographes peut-il présenter des profils assez fortement distincts, dont aucun en outre ne correspond nécessairement à celui qui apparait dans les documents de nature « administrative », réputés pourtant plus objectifs.

Le risque de biais est particulièrement élevé chez Létald, car notre auteur, par souci d’efficacité et grâce à son incontestable talent, s’avère capable de s’affranchir des procédés en usage chez les autres hagiographes tout en donnant l’impression de s’y conformer. Laissons donc de côté ce qui concerne l’existence du saint à proprement parler, dont l’époque supposée est déduite du rôle supposé que Martin aurait joué auprès de Félix, durant l’épiscopat de ce dernier (549-582) ; l’année de sa mort n’est d’ailleurs pas donnée par Létald, estimée selon les auteurs modernes entre 600 et 630, mais sans aucune preuve. On s’intéressera à la destinée posthume de Martin, qui débute au lendemain de sa mort, arrivée à Saint-Georges-de-Montaigu, avec le récit très vivant du retour mouvementé et miraculeux de la dépouille du saint à Vertou.

*

A la nouvelle de la mort de Martin, les Vertaviens affligés par le chagrin s’étaient rendus en nombre à Saint-Georges-de-Montaigu pour prendre possession de son corps et le ramener à Vertou ; mais les habitants du lieu s’y opposaient, arguant qu’il devait reposer là où, à l’appel du Christ, il avait terminé ses jours (Cum ergo Martini obitum fratrum audisset turba Vertavensium, cum maximi maeroris luctu Durivum adeunt, et ut glebam illius sanctissimi corporis secum evehant, omnimodis nituntur. Durivenses econtra contendunt dicentes, ut ubi Christo vocante susceperat terminum vitae, ibi nihilominus Christo annuente jus habeat sepulturae). Un orage soudain et bientôt la nuit vinrent interrompre les débats : les habitants de Saint-Georges-de-Montaigu s’étaient endormis fatigués, ne laissant personne pour surveiller la foule des Vertaviens (Supervenientibus imbris et noctis intempesta, cunctis quietem optantibus, Durivenses omnes tam grandis sopor invadit, ut nullus superesset qui ex eorum numerositate vigilaret) ; ceux-ci en profitèrent pour se saisir du corps du saint et entreprirent de rentrer chez eux (Videntes ergo partis adversae Vertavenses aemulos obdormisse, pertinaciter corporis sancti onus efferunt, ingentisque laetitiae animosi certatim ad propria reverti moliuntur). En toute hâte, ils parvinrent au bord de la rivière appelée à cette époque Laudosa : c’est là qu’eut lieu l’événement que se propose de raconter l’hagiographe et qui fut à l’origine du changement de cet hydronyme en celui de Separis (Sic ergo cum omni velocitatis cursu ad oram fluminis, quod tunc Laudosa dicebatur, perveniunt, nunc autem proventu rei, quam dicturi sumus, Separis nomen sortitum)[46].

Comme dans le cas d’Herbadilla engloutie sous les flots, le prodige dont il est question est explicitement emprunté à la Bible : les habitants de Saint-Georges-de-Montaigu, constatant à leur réveil que leur précieux trésor leur a été soustrait, se lancent à la poursuite des ravisseurs, dont la progression est, comme on l’a dit, stoppée par la Sèvre. Cependant, forts de l’exemple de Moïse et du peuple juif sauvés par la traversée miraculeuse de la Mer rouge, les Vertaviens redoublent de prières et voilà soudain que la rivière suspend son cours, leur permettant de la traverser sans risque ; les habitants de Saint-Georges-de-Montaigu, observant la grande masse d’eau ainsi retenue et se souvenant du triste sort de Pharaon, ne s’engagent pas à leur suite et la rivière reprend bientôt son cours vers l’aval, ayant ainsi séparé, conformément au nom qu’elle porte désormais, les uns des autres[47]. Naturellement l’explication ne vaut rien du point de vue de l’étymologie ; mais il s’agit là d’un procédé habituel à l’époque et pas seulement chez les hagiographes : il est conforme en tout cas à la volonté de ces derniers d’enraciner le miraculaire dans le réel.

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Létald ne va pas s’arrêter en si bon chemin et conclut l’épisode par une historiette à vocation étiologique :

Cum ergo transissent, hostesque jam minime timerent, unus eorum conversus, cum insultationis elogio Durivensibus ait : Quare vos tardius promovistis ? quo dicto, dum hos laetitia erigit, illos opprimit pudor : nomen illi loco usque hodie permanet Attarde vocatur. Videntes ergo Durivenses tot mirabilia, nec voluntati superni artificis reniti potentes, cum confusionis nota revertuntur ad propria[48].

L’anecdote est à ce point vivante qu’elle paraît frappée au coin de l’authenticité : même inventée, elle sonne juste, du moins si l’on considère qu’elle est supposée expliquer l’origine d’un nom de lieu selon les principes de l’étymologie médiévale qui emprunte souvent aux jeux de mots ; mais surtout cette historiette est basée sur un détail de psychologie humaine, dont il a existé de tout temps tant d’exemples qu’il apparaît irréfutable : un courageux fuyard, une fois hors de portée des habitants de Saint-Georges-de-Montaigu, se paie le luxe de les invectiver en les moquant (« mais pourquoi une telle lenteur ? ») augmentant ainsi leur honte, tandis que la joie explose chez les Vertaviens. 

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Le nom Attarde n’a apparemment pas laissé de vestiges dans la toponymie des parages concernés et, depuis longtemps, les commentateurs ont privilégié le lieu nommé Portillon, où la traversée de la Sèvre pouvait s’effectuer grâce à un gué avec pierres[49] : c’est ce qu’indique Albert Le Grand qui rapporte explicitement que le miracle mosaïque s’est produit « en un endroit qui s’apelle le Port Tillon »[50]. Au-delà d’une substitution toponymique, il faut évidemment s’interroger avec Léon Maître, sur la réalité même du nom Attarde[51], lequel pourrait avoir été, de même que l’anecdote qui s’y rapporte, le produit de la seule imagination de Létald.

Or, Attarde réapparait un peu plus loin sous la plume de notre auteur pour désigner le lieu où habitait l’un de ses principaux informateurs, un dénommé Arnulfe, lequel avait appartenu anciennement à la domesticité du monastère de Vertou : Létald affirme s’être rendu sur place et avoir fréquemment conversé avec ce personnage, auquel les Normands avaient coupé les mains (Hujus rei quam diximus, licet adsint multi testes, ipsaque res suis utatur testimoniis, unus praecipue est Arnulfus, cui barbara Normannorum utrasque abstulit manus. Nam hic ex antiqua Vertavensis monasterii fuit familia, locumque adhuc incolit qui Attarde dicitur, ubi corpus viri Dei divisis transiit aquis, sicut jam supra dictum est : in quo etiam loco nos fuimus et cum eodem homine saepe confabulati sumus[52]).

Cette sorte d’amitié, ou du moins de complicité, entre un lettré de la trempe de Létald et un personnage qui apparaît mi-rustaud, mi-finaud, son infirmité, avait-il expliqué à notre auteur, qui en est émerveillé, ne l’empêchait pas de chasser le sanglier et même, à cette occasion, de se servir d’une lance [53], – a paru étrange, voire suspecte à Maître[54], qui ne l’admet que pour en faire sentir toute l’incongruité[55]. Si ce duo, assez improbable, a véritablement existé, comme on peut en faire l’hypothèse, il faut en conclure qu’il a remarquablement fonctionné : c’est d’ailleurs parce qu’il s’affirme fort des récits des témoins auxquels il se réfère, et plus particulièrement de ce que ses entretiens avec Arnulfe lui ont appris, ou simplement suggéré, que Létald n’hésite pas à déclarer avec aplomb, sinon avec sincérité, qu’il n’a rien rapporté de fictif sur Martin (Haec ideo diximus, ut quae de Martino scribimus ficta non esse cunctis innotescamus[56]).

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Ce n’est pas la première fois qu’un hagiographe prétend avoir recueilli des traditions orales, généralement de la part des personnes les plus âgées et les plus lettrées du groupe dont le saint concerné est le patron (communautés monastiques, canoniales, paroissiales et leurs différents cadres). Avec Arnulfe, familier des moines de Vertou, et le vicomte Rainaud, qualifié venerabilis[57], sans doute pour avoir fait sa profession monastique ad succurendum, nous sommes dans un cas différent : certes, la première condition parait remplie ; mais la seconde ne l’est évidemment pas, du moins s’agissant d’Arnulfe. Autant dire que l’information par lui délivrée à l’hagiographe l’a sans doute été sans filtre, ni précaution, de manière abrupte : c’est le cas de l’anecdote des mains coupées, que l’absence d’arrière-plan miraculaire rend particulièrement suspecte. Ici, pas de phénomène de décantation « mémoriographique », qui permet le tri et la sédimentation lente des souvenirs et leur accommodation dans un récit fluide construit et transmis par des personnes cultivées, à tout le moins formées[58] : d’où le risque que Létald, dans le traitement de ses sources orales, ait pu en exagérer la portée, au-delà même des excès possibles de ses informateurs. L’exemple des collectes de folklore au XIXe siècle, quand bien même il n’est évidemment pas question de procéder à une comparaison tout aussi inadéquate qu’anachronique, a montré par quel phénomène d’entrainement réciproque, celui qui raconte et celui qui note peuvent être amenés à co-fabriquer un « objet » qui n’appartient pas plus à la tradition populaire qu’à la production savante et qui, conséquemment, ne s’avère d’aucune utilité pour juger de l’intérêt de l’une et de la pertinence de l’autre.

 

IV

La double indication donnée par Létald, à savoir qu’Arnulfe avait appartenu à l’ancienne familia monastique de Vertou et qu’il avait eu à subir un sort particulièrement odieux de la part des Normands, – permet de supposer que le monastère eut à souffrir de ces derniers à une époque qui ne saurait être antérieure au dernier tiers du Xe siècle. Peut-être au reste s’agissait-il moins d’incursions de Scandinaves à proprement parler, que de pillages par ceux d’entre eux qui, depuis quelques décennies, s’étaient établis en Neustrie ; sans oublier la possibilité d’une collaboration entre les uns et les autres. C’est bien en tout cas à cet événement dramatique que fait allusion Létald quand il décrit les Normands s’attaquant à l’if sacré du monastère de Vertou et aussitôt miraculeusement punis : épisode intervenu, précise-t-il, bien longtemps après le règne d’Alain le Grand[59]. Pourtant, la fuite des moines du lieu est quant à elle rapportée à la suite de l’épisode du sac de Nantes, avec l’assassinat de l’évêque Gohard et le massacre de la population, auquel notre auteur assigne fallacieusement la date de 864 au lieu de 843 :

Igitur anno dominicae Incarnationis octingentesimo sexagesimo quarto, cum nomen gentis Normannicae apud nostrates nec auditum foret, repente de vagina suae habitationis exiens, nancta piraticam, contigua mari Britannico depopulata loca navibusque longis alveum ingressa Ligeris, Namneticae properat ad moenia urbis, speciem praeferens multitudinis negotium exercentis. Dies tunc festivus cunctum ad ecclesiam invitarat populum, nam erat sancti praecursoris nativitas, nec erat suspicio bellici tumultus et intrabatur portis semper patentibus. Sanctus etiam pontifex Gunhardus in ecclesia Beati Petri Apostoli super ara Ferreoli martyris, quae est ad laevam illius sedis, reverenter sacris instabat missarum sollemniis. Igitur, nullo prohibente, ingressi Normanni, sub vestibus arma celant gladiosque subumbrant, intrantesque ecclesiam enses denudant ipsumque pontificem Sursum corda dicentem iuxta sacram victimam obtruncant ; bacchantesque per populum nulli aetati parcendum putant. Ipsaque urbe vastata ecclesiaque incensa, cum grandi captivorum multitudine et pretiosa civitatis supellectile naves conscendunt et in insulam quamdam contubernium faciunt. Inde eruptionibus crebris maritimis infensi oris multa fortitudine pressos incolas ignotas cogunt perquirere terras[60].

*

L’erreur de datation commise par Létald nous semble de nature à discréditer le rapprochement entre les événements nantais de 843, dont notre auteur a sans doute trouvé mention dans la documentation écrite[61], et les préparatifs de la fuite des moines de Vertou à bord de six navires chargés des biens de leur maison[62], dont le récit très vivant pourrait largement s’inspirer là encore du témoignage oculaire d’Arnulfe : outre signaler que deux embarcations avaient été renversées par le vent et perdues avec leur cargaison[63], l’hagiographe donne des indications intéressantes sur la manière dont furent enterrées sur place les réserves de plomb destinées à la rénovation en cours de l’église abbatiale[64].

Létald poursuit son récit, d’abord en racontant l’exode jusqu’au monastère de Saint-Jouin-de-Marnes des religieux de Vertou dépositaires de la châsse des reliques de leur saint, lesquels auraient suivi, en ce qui les concerne, un itinéraire strictement terrestre dont témoigne leur étape ad locum qui Noviheria dicitur, ubi beatus Veteranus quiescit humatus[65] ; puis en rapportant les différentes difficultés dont ils avaient eu à triompher, grâce notamment à l’appui de Pépin, roi d’Aquitaine, avant de pouvoir être finalement accueillis par les chanoines qui occupaient la place : illustration de la compétition et des tensions contemporaines entre le modèle canonial et le modèle monastique, en particulier bénédictin, pour satisfaire au mieux aux exigences de la vie cénobitique. Ce véritable « compte rendu », très détaillé, où abondent toponymes s’appliquant à des lieux plus ou moins importants[66] et anthroponymes désignant des individus plus ou moins connus[67], ainsi que des éléments institutionnels et sociaux[68], dont l’ensemble vient donc crédibiliser un discours où le miracle occupe une place importante, – pourrait avoir emprunté une partie importante de sa matière à l’ouvrage de l’archidiacre Seguin, auquel Létald affirme avoir puisé[69].

*

Le talent de Létald est d’être parvenu, indépendamment de la chronologie, de l’importance et de la véracité des événements qu’il raconte, à inscrire dans une perspective susceptible d’intéresser le lecteur, et renforcée par le dynamisme de la narration, des sources très diverses, y compris vulgaires, qui évoquent la pression permanente des Normands ; en tout état de cause, les incursions de ces derniers à Nantes et dans le Nantais, débutées en 843, se sont effectivement prolongées jusqu’à la fin du Xe siècle : ainsi le bref recueil anonyme des Miracula ecclesiae Namnetensis, qu’il faut peut-être attribuer à l’auteur anonyme du Chronicon Namnetense[70], rapporte-t-il au règne de Lothaire (954-986) deux épisodes qui concernent leurs déprédations[71]. Cependant, la manière dont Létald s’est approprié les sources en question et les a mises en œuvre avec efficacité ne permet pas d’établir précisément quand le monastère de Vertou a été détruit par les Normands : il nous semble possible de conclure que cette destruction a résulté d’au moins deux attaques à plusieurs décennies d’intervalle, la première avant 916, – date de l’acte le plus ancien où le nom de Martin figure en association avec celui de Jouin en tant que patrocinium du monastère poitevin[72], la seconde à une époque proche du temps où a vécu notre auteur. Il lui a donc été effectivement possible de rencontrer et d’interroger des témoins oculaires de l’événement et d’apprendre d’eux divers éléments venus nourrir son récit ; mais demeure posé plus généralement le problème de la fiabilité des informations figurant dans les textes hagiographiques et que la critique des sources permet rarement de recouper, du moins quand il s’agit de points de détail : ainsi, il n’est pas exclu que la force de conviction des interlocuteurs de Létald et le cachet d’authentirusticité dont ils étaient revêtus à ses yeux, aient pu le conduire à surinterpréter leur témoignage, à moins, tout au contraire, qu’il ne soit parvenu à falsifier, voire à subvertir leur mémoire au profit de la démarche mémorielle de ses commanditaires[73].

 

André-Yves Bourgès



Les hyperliens ont été vérifiés/actualisés le 31 janvier 2024.

[1] Thomas Head : « Letaldus of Micy and the hagiographic tradition of Selles-sur-Cher », Analecta Bollandiana, 107 (1989), p. 393-414 ; Hagiography and the Cult of Saints. The Diocese of Orléans, 800-1200, Cambridge, 1990, en particulier p. 81-89 et p. 211-227 ; « Letaldus of Micy and the hagiographic traditions of the abbey of Nouaillé. The Context of the Delatio corporis S. Juniani », Analecta Bollandiana, 115 (1997), p. 253-267.

[2] Richard Belsky, « Thomas Head 1956-2014, Historian of the Middle Ages », Perspectives on History, 53 (2015), n°7, p. 50.

[3] T. Head, Hagiography and the Cult of Saints…, p. xi.

[4] L’accès à cet ouvrage nécessite de se reporter à différentes éditions, plus ou moins complètes, à savoir celles de  Jean Mabillon, Acta sanctorum ordinis S. Benedicti, t. 1, Paris, 1668, p. 375-378 et 681-692 ; de Joseph Van Hecke, Benjamin Bossue, Victor De Buck et Edouard Carpentier, Acta sanctorum octobris, t. 10, Bruxelles, 1861, p. 805-817 ; de la Société des Bollandistes, Catalogus codicum hagiographicorum latinorum in bibliotheca nationali parisiensi, t. 3, Bruxelles-Paris, 1893 (Subsidia hagiographica, 2), p. 316-317 ; et de Bruno Krusch, Monumenta Germaniae Historica. Scriptores rerum Merovingicarum, t. 3, Hanovre, 1896, p. 567-575. Nous avons eu recours indifféremment à ces éditions, tout en indiquant à chaque citation celle que nous avons utilisée. Outre le témoignage explicite d’un manuscrit ancien (cf. infra n. 10), l’attribution de cet ouvrage à Létald sur des critères de langue a été proposée par B. Krusch, op.cit., t. 4, Hanovre-Leipzig, 1902, p. 771, et aussitôt reprise par les Bollandistes, en particulier Albert Poncelet.

[5] Les résumés de la conférence « Langue et littérature latines du Moyen Âge » dirigée par cette chercheuse font état de l’avancement d’un projet d’édition des Opera omnia de Létald (premier volume attendu en 2023) : voir Annuaire de l'École pratique des hautes études (EPHE), Section des sciences historiques et philologiques, n° 151 (2020), p. 183-194, n° 152 (2021), p. 220-223, n° 153 (2022), p. 235-237, et n° 154 (2023), p. 233-234. Nous aurons l’occasion de faire plusieurs emprunts à ces résumés précis et concis.

[6] Georges Pon, « Le monachisme en Poitou avant l’époque carolingienne », Bulletin de la Société des antiquaires de l'Ouest et des musées de Poitiers (4e série), 17 (1983), n° 2, p. 95-96 : «  On a supposé également que l'auteur de la vie de saint Martin de Vertou (+ début VIIe siècle) aurait ‘’repris et complété une vie mérovingienne perdue’’ mais il paraît plus probable que cette œuvre médiocre a été commandée à un hagiographe professionnel, Létald de Micy, qui se souciait surtout d'aligner aussi élégamment que possible les lieux communs propres au genre littéraire qu'il cultivait ».

[7] André-Yves Bourgès, « Les Vikings dans l’hagiographie bretonne », Magali Coumert et Yvon Tranvouez (dir.), Landévennec, les Vikings et la Bretagne. En hommage à Jean-Christophe Cassard, Brest, 2015, p. 211-228.

[8] Ibidem, p. 216.

[9] Ibid., n. 31.

[10] Létald est explicitement désigné comme l’auteur de cette vita dans un manuscrit de l’abbaye de Clairvaux, aujourd’hui le ms Montpellier, Bibliothèque interuniversitaire, section médecine, H 1, vol. 2, f. 238v : Explicit vita sancti martini abbatis edita a Letaldo nomine monacho. Ainsi que l’écrit A.-M. Turcan-Verkerk, Annuaire, n° 151, p. 192 : « Cette attribution ne remonte qu’au XIIe siècle, mais à une date et dans un lieu tels que personne n’aurait pu se souvenir de Létald ou trouver un quelconque intérêt à créer une fausse attribution : on a donc dû trouver cette attribution dans une source plus ancienne, ce qui la rend assez fiable ».

[11] Voir le CR anonyme, très critique, de l’étude de Léon Maitre, Vertou avant et après le christianisme. Saint Martin de Vertou, ses contemporains, ses fondations, ses biographes, Nantes, 1897 (Les villes disparues de la Loire-Inférieure, 3) ; ce CR a paru dans les Analecta Bollandiana, 17 (1898), p. 245-246 : le recenseur s’oppose en l’occurrence à l’avis d’un autre bollandiste, Victor De Buck, qui avait préconisé pour sa part de reconnaître la vita la plus ancienne dans le texte BHL 5670.

[12] Édition Krusch, p. 571 : Eo tempore cum idem locus clare polleret, fuit quidam iuvenis Tolosanus, claris parentibus ortus, cui a primaevo nativitatis exordio eundi et videndi officia negata sunt. Qui per somni quietem audivit : « si Martini tumulum petas, ilico sanitate gaudebis ». Ignorans hic cuius Martini suffragium petere iuberetur, Turonis urbem subvectus a beato Martino de recipiendae sanitatis gaudio auditus non est. Post haec Salionum petens cum nihil proficeret, rursum iubetur in somnis Vertavum adire : de hoc Martino sibi iussum fuisse. A noter par ailleurs que si Martin, réputé fondateur de Saujon, est bien du Ve siècle, il lui a été évidemment impossible d’accueillir en personne dans son monastère Émilion, originaire de Vannes, lequel, selon sa vita [BHL 99] aurait vécu au VIIIe siècle ; mais cette date elle-même doit être encore abaissée car l’hagiographe précise que le saint avait entrepris un pèlerinage à Compostelle. Il convient de ne pas confondre Émilion avec un certain Émilien alias Émiland, son contemporain, dont l’office tardif [BHL 105], probablement post-tridentin indique qu’il était évêque de Nantes, ce qui n’est nullement avéré : sur ces différents homonymes voir notre notule en ligne intitulée « Émilien alias Émiland de Bourgogne, Millán de la Cogolla (Rioja) et Émilion du Bordelais », Hagio-historiographie médiévale (21 janvier 2024), https://www.academia.edu/113808396.

[13] Voir l’article de vulgarisation de Jean Moreau, « Les autres saints Martin », Mémoires de la Société archéologique de Touraine, 44 (2007), p. 617-630.

[14] Jean-Pierre Brunterc'h, L'extension du ressort politique et religieux du Nantais au sud de la Loire : essai sur les organisations et dislocation du pagus d'Herbauge (IXe siècle – 960), thèse de l'École des chartes ; résumé dans École nationale des chartes, Positions des thèses des élèves de l'École des chartes (1981), p. 39-49.

[15] Édition Krusch, p. 570-571 : ut proceres Britonum, quorum iuris eadem regio est, si quando ibi accesserint, prius ad arborem venientes ibidem Christum adorent et postmodum ecclesiam intrent. Quod rex Alanus facere consueverat et morem hunc avitis parentibus suis fuisse dicebat. Est autem id genus arboris aptum spiculis et arcubalisticis ; vulgo enim dicitur ivus (le passage concerné est souligné par nous).

[16] Venance Fortunat, Poèmes, III, 8 (v. 17-20) : Flos generis, tutor patriae, correctio plebis/Eloquii flumen, fons salis, unda loquax/Semita doctrinae, jus causae, terminus irae/Cujus in ingenium hic nova Roma venit.

[17] Acta sanctorum octobris, t. 10, p. 809 : Itaque dum perlucrandis Christo fidelium animabus sollicitus diversum abiret, Durivum venit. Porro hoc in loco Martinus idem duo aedificarat coenobia, quorum unum virorum insignibant agmina, aliud sane sanctimonialium gubernabatur caterva.

[18] Léon Maître, « Notice sur le lac de Grandlieu (Loire-Inférieure) », Bulletin de géographie, historique et descriptive – Année 1895 (1896), p. 405-406 : « La légende une fois accréditée dans l'ancien clergé par les Vies de Saints et les leçons du bréviaire, ne tarda pas à se répandre dans le public, et, bien que les textes ne fissent pas d'application à telle ou telle localité, le vulgaire considérait que le lac de Grandlieu était le seul emplacement admissible. Cette croyance populaire était le principal argument invoqué par le propriétaire du lac, Milet de Machecoul, en 1387, pour en revendiquer la main levée ; il allègue qu'il y avait autrefois une cité en cet endroit qui appartenait à ses prédécesseurs, allusion évidente à la destruction d'Herbauge. Milet aurait été fort embarrassé pour produire des preuves du fait qu'il invoquait, mais il s'empressait d'appeler à son aide la tradition légendaire, de peur que la généalogie douteuse de sa femme, Jeanne Gastinel, ne parût pas suffisante au duc de Bretagne ».

[19] Yves Durand (dir.), Nantes, Paris, 1985 (Histoire des diocèses de France, 18), p. 32-33.

[20] Nous nous éloignons sur ce point de l’opinion de Florian Mazel, L’évêque et le territoire. L’invention médiévale de l’espace (Ve-XIIIe siècle), Paris, 2016, p. 183 : « La rédaction tardive de ce texte (fin du Xe siècle) laisse toutefois présager qu'il s'agit d'une version des événements destinée à enraciner dans un temps très lointain l'emprise des évêques de Nantes sur le pays de Retz et le monastère de Vertou, qui ne remonte probablement qu’à quelques décennies, tout au plus à l’époque carolingienne ». De plus, de notre point de vue, la vita de Martin, comme d’autres ouvrages de sa catégorie, ne peut rendre compte de l’attitude de « prélats ne tenant guère compte du cadre théorique des cités pour leur action pastorale » : en effet, même si l’on prend la précaution de dire que « le témoignage de ces textes reste sujet à caution pour l'époque où les faits racontés sont censés s'être déroulés, les VIe-VIIe siècles », il nous semble difficile de conclure qu’une telle pratique  « ne choquait pas et ne suscitait aucune réprobation aux époques carolingienne et postcarolingienne » (Idem, p. 101).

[21] Ce qui ne signifie évidemment pas que lui fussent étrangères les « rivalités entre les Bretons, les comtes d’Anjou et ceux de Blois » au sujet du comté de Nantes, évoquées par Isabelle Carton, Les pérégrinations de Saint-Philibert. Genèse d’un réseau monastique dans la société carolingienne, Rennes, 2010, p. 51. Au contraire, comme le souligne cette chercheuse, qui, en l’occurrence, reprend à son compte l’analyse de T. Head, « cet arrière-plan conflictuel n’est sans doute pas étranger au choix de Létald de Micy comme hagiographe, par les moines de Saint-Jouin » (cf. infra n. 27).

[22] Il s’agit du poème anonyme intitulé Versiculi de eversione monasterii Sancti Florentii, dans lequel la gent bretonne est qualifiée crudelissima, vere bruta. Cependant l’attribution proposée par Jean-Paul Bonnes, « Un lettré du Xe siècle. Introduction au poème de Létald », Revue Mabillon, 33e année (1943), p. 23-47, « n’est pas assez étayée » écrit A.-M. Turcan-Verkerk, Annuaire, n° 151, p. 188. A côté de ces critiques, on notera que Létald, dans son hagio-chronique de Micy, a brossé un portrait plutôt bienveillant de plusieurs prélats bretons qui pourtant étaient simoniaques.

[23] Acta sanctorum octobris, t. 10, p. 816 :  Monasterii nostri quidam cocus fuit Aldrincus nomine, cujus filius adhuc superest, et officio et vocabulo fungitur ipso : qui propter metum Brittonum, qui ex immissione Saverici Toarcensibus infesti erant, domum suam in suburbio reliquit, et quamdam domum, penes cryptam beati viri positam, cum familia subintravit (« Un cuisinier de notre monastère nommé Aldrincus, dont le fils, toujours vivant, porte le même nom et remplit la même fonction,  quitta sa maison des faubourgs [de Thouars] par crainte des Bretons, que l’attitude de  Savari de Thouars avait rendu hostiles, et se réfugia avec sa famille dans une maison située près de la crypte de Saint-Martin »).

[24] Comme on peut le lire, par exemple, dans le passage cité à la note précédente où il parle de Saint-Jouin comme de « notre monastère ».

[25] A moins de considérer comme telle l’anecdote sur l’arbre sacré, comme semble le penser Jean-Christophe Cassard, Les Bretons de Nominoë, Rennes, 2003, p. 225.

[26] Acta sanctorum octobris, t. 10, p. 806 :  Porro locus sacri ejus exorsus Neustriae fuit urbs, quae Namnetis dicitur.

[27] I. Cartron, Les pérégrinations de Saint-Philibert…, p. 51-52 : « T. Head a proposé une analyse politique de l’œuvre de Létald, moine à Micy, au moment où Robert de Blois en est l’abbé. Ce dernier est proche des comtes de Blois, lesquels cherchent à limiter le pouvoir des comtes d’Anjou en Nantais, dans les Mauges et en Laudunois, où se situent justement les monastères de Saint-Jouin et de Vertou. Les moines de Saint-Jouin entretiennent des relations privilégiées avec les vicomtes de Thouars et le vicomte d’Anjou, Renaud le Thuringien, avec lesquels le comte de Blois tente de s’allier à partir de 994. La composition par Létald de la Vita et des Miracula pour les moines de Saint-Jouin viserait alors à affirmer l’autonomie du monastère face au pouvoir croissant du comte d’Anjou. Les Miracula auraient donc pu être rédigés entre 994 et 1004, date à laquelle Létald s’oppose à l’abbé Robert ».

[28] Nous suivons ici, en l’adaptant à notre propos, la démonstration de F. Mazel, L’évêque et le territoire…, p. 210-211, concernant la « stratégie » des moines de Saint-Florent.

[29] Bernard S. Bachrach, « Fulk Nerra's exploitation of the facultates monachorum, ca. 1000 », B. S. Bachrach & David M. Nicholas (ed.), Law, custom, and the social fabric in medieval Europe. Essays in honor of Bryce Lyon, Kalamazoo, 1990, p. 29-49.

[30] Idem, Fulk Nerra, the Neo-Roman Consul, 987-1040 : A Political Biography of the Angevin Count, Berkeley, 1993, p. 79 : « Although Letaldus set this story in the reign of King Dagobert I and had the administrator of the divisio die a nasty death at the hands of Saint John and Saint Martin, it is clear from a broad spectrum of evidence, including terminology, that the target of criticism was not an otherwise unknown Merovingian fiscal innovation but Fulk Nerra's systematic efforts to utilize half or perhaps even more of monastic wealth for secular purposes. Letaldus was circumspect in placing the fiscal innovations he condemned in the distant Merovingian era, for he could easily be connected to Bishop Renaud and is likely to have been little more than the prelate's amanuensis in this matter ».

[31] A.-M. Turcan-Verkerk, Annuaire, n° 151, p. 187-188.

[32] Voir l’opinion de G. Pon rappelée supra n. 6.

[33] T. Head, Hagiography and the Cult of Saints…, p. 226 : « Letaldus was a writer of great erudition and stylistic grace » ; Armelle Le Huërou, « La Vie de saint Julien du Mans (BHL 4544) de Létald de Micy », Florian Mazel (dir.), La fabrique d’une légende. Saint Julien du Mans et son culte au Moyen Âge (IXe-XIIIe siècle), Rennes, 2021, p. 215 : « Létald, moine de l’abbaye bénédictine Saint-Mesmin de Micy, s’est en effet illustré à partir des années 980 dans la composition de textes hagiographiques dont on s’accorde à souligner la qualité littéraire et, plus rare en ce domaine, la rigueur de la démarche intellectuelle ».

[34] A.P. [Albert Poncelet], « La bibliothèque de l’abbaye de Micy au IX et au Xe siècle », Analecta Bollandiana, 23 (1904), p. 80-81, souligne « la manière de Létald et le soin avec lequel il consultait manuscrits et archives pour recueillir les renseignements dont il avait besoin ». T. Head, Hagiography and the Cult of Saints…, p. 93, met en évidence à ce propos « the differences between the methodologies of Letaldus of Micy and of Hugo of Fleury » ; mais, comme le rappelle A.-M. Turcan-Verkerk, Annuaire, n° 152, p. 223, seule une « synthèse générale sur Létald et son œuvre » devrait permettre à terme « de revenir sur la critique d'attribution et la chronologie relative des œuvres, et par conséquent sur la culture et les méthodes de leur auteur, et de donner des aperçus sur son influence ».

[35] T. Head, Hagiography and the Cult of Saints…, p. 82 : « Letaldus composed hagiographic works for various ecclesiastical institutions allied to his abbey. Those which he wrote for the monasteries of Saint-Jouin-de-Marnes (Vita et miracula s. Martini Vertavensis (BHL 5667-8)) and Selles-sur-Cher (Vita et miracula s. Eusicii (BHL 2754 and 2756)) were strikingly similar in form to the Miracula s. Maximini ». A noter que l’attribution de la vita d’Eusice à Létald reste discutée : ainsi Flavia Petitti, « La Vita I e i Miracula sancti Eusitii (BHL 2754 e 2756) un’opera di Letaldo di Micy?  Per una rilettura del problema », Hagiographica, n°29, 2022, p. 141-186, a-t-elle récemment proposé, comme le rapporte A.-M. Turcan-Verkerk, Annuaire, n° 152, p. 222, d’attribuer la composition de cet ouvrage à « l’école hagiographique ayant succédé à Létald, active dans les années 1020-1030 ».

[36] A.-M. Turcan-Verkerk, Annuaire, n° 151, p. 185.

[37] Marc Simon (OSB), « Létald de Micy : histoire ou fantaisie ? », Danièle Conso, Nicole Fick, Bruno Poulle (éd.), Mélanges François Kerlouégan, Besançon-Paris, 1994, p. 569-577.

[38] A.-Y. Bourgès, « Le personnage d'Arthur sous la plume des hagiographes bretons continentaux et insulaires au Moyen Âge », https://www.academia.edu/104654739.

[39] A. Le Huërou, « La Vie de saint Julien du Mans … », p. 217 : « Ainsi après avoir servi les intérêts de Robert de Blois et de ses alliés contre Foulques Nerra, Létald aurait soutenu ceux d’Avesgaud, partisan du comte d’Anjou, entre autres pour que Micy jouisse de sa protection ».

[40] Ibidem : « Si cette hypothèse est séduisante, il n’est pas exclu que la composition de BHL 4544 soit plus tardive, par exemple sous l’abbatiat d’Albert, abbé de Micy de 1018 à 1036, à la fois neveu de l’ancien abbé Annon – sous lequel Létald était entré à Micy – et de l’évêque Avesgaud. On voit d’ailleurs ce dernier exempter de charges synodales le prieuré de Saint-Jean de la Motte au diocèse du Mans qui dépendait de Micy ».

[41]  Marie-Céline Isaïa « Les lettres dans l’hagiographie médiolatine (IXe-XIIe siècle) », Cahiers de Civilisation Médiévale, 61 (2018), p. 109.

[42] David Victoroff, « La publicité et le nombre », Revue française de sociologie,19 (1978), n°1, p. 157-163. Cette thématique du nombre affleure dans la production hagiographique, quand il s’agit par exemple de quantifier les miracles attribués à l’intercession du saint.

[43] A.-Y. Bourgès, « Effet de réel et hagiographie : quelques aspects de la question », Hagio-historiographie médiévale (30 décembre 2019),  www.academia.edu/41465070.

[44] Comme on peut l’observer, en Bretagne notamment, avec de nombreux saints de la toponymie ne faisant l’objet d’aucun culte liturgique, non plus que « populaire ».

[45] La formule, empruntée à Guy Philippart, permet ainsi de ne pas entrer dans une discussion, souvent stérile, sur l'historicité du saint.

[46] Acta sanctorum octobris, t. 10, p. 809.

[47] Ibidem, p. 809-810 : At Durivenses, ut altius paullo repetamus, evigilantes, thesauroque quem servabant se privatos videntes, persequi aggressi sunt fugientes. Porro illi, altero Moyse duce, jam ad oram supradicti fluminis convenerant, cum ecce vident cominus armaturam telis minacem, jamque fluvii litora propinquantem. Diffidunt animis, precibusque conversi excelso supplicant Domino, ut proprio se nequaquam frustrari pateretur patrono. Illis itaque intenta mente precum fundentibus vota, mox fluvius rapida sui cursus retorquens vestigia, atque in unius molis sese attollens verticem, vectoribus corporis sancti facultatem tribuit transeundi. Durivenses econtra, memores periculi quod olim contigerat Pharaoni, haudquaquam fluminis alveo se credere ausi, spectabant mirabanturque tantae novitatis eventum, victoresque alterum Domino concinentes Mosaïci carminis hymnum. His ergo qui Martini corpus vectitabant velociter transmissis, rursus aquae notas repetentes semitas alveo meatus sui restitutae sunt.

[48] Ibid., p. 810.

[49] Michel Kervarec, Terroir et Moyen âge au pays nantais : Rézé, Les Sorinières, Vertou, Nantes, 1999, p. 54.

[50] Albert Le Grand, La vie, gestes, mort et miracles des saincts de la Bretaigne armorique, Nantes, 1637, p. 387.

[51] Léon Maître, « Saint Martin de Vertou », Bulletin historique et philologique du comité des travaux historiques et scientifiques. Année 1896 (1897), p. 376-378.

[52] Acta sanctorum octobris, t. 10, p. 812.

[53] Ibidem :  De quo mirabile est, quia quamvis utrasque manus perdiderit, venationis industriam non amisit, adeo ut apros qui in loco eodem ferocissimi habentur, non solum pedicis, sed etiam hasta adsecutus sit.

[54] L. Maître, « Saint Martin de Vertou », p. 379 : Létald « semble préférer le témoignage oral et très contestable de quelques particuliers comme le vicomte Rainaud qui, dit-il, lui a raconté beaucoup de miracles étonnants, et l’ancien serviteur de l’abbaye de Vertou, Arnoulf, qui chassait sans le secours de ses mains ».

[55] Ibidem, p. 379-380 : « Quand un auteur est aussi peu difficile pour le choix de ses sources d’information, il est bien permis de se tenir sur ses gardes avant de le suivre même dans la voie qu’il devrait le mieux connaître ».

[56] Acta sanctorum octobris, t. 10, p. 812.

[57] Édition Krusch, p. 569 : Cuius rei testis est venerabilis Rainaldus Andegavorum vicecomes, qui haec et alia plurima de Martino stupenda narrat miracula.

[58] A.-Y. Bourgès, « ‘’Mémoriographie’’, hagiographie, archéologie et épigraphie : Landévennec et le ‘’cas Gradlon’’ (Ve-XIIIe siècles) », Hagio-historiographie médiévale (24 novembre 2021), https://www.academia.edu/62273975.

[59] Édition Krusch, p. 571 : Cumque post multa tempora ibidem Nortmanni venissent, duo eorum ascendentes arborem, arcus sibi demere scrutabantur. Unus repentino crepitu oculos amisit, alter decidens colli sui integritatem moriens contrivit ; alter nihilominus dum descendere nititur et ubi pedem ponat, nescit, lapsus ilico coxam sibi malesanus confregit. Quod videntes ceteri pavore percussi, praesumere ulterius talia non sunt ausi.

[60] Ibidem, p. 573.

[61] Ferdinand Lot et Louis Halphen, Le règne de Charles le Chauve. Première partie, Paris, 1909 (Bibliothèque de l’École pratique des hautes études, sciences historiques et philologiques, 175), respectivement p. 77-82.

[62] Édition Krusch, p. 573 : Colligunt quae possunt et in sex magnis navibus componunt, effossoque a loco sepulturae beato viro, loculo imponunt aureo, gemmis nobilibus insignito.

[63] Ibidem : Duae navium impatientia ventorum obrutae et cum omnibus rebus pessumdatae sunt.

[64] Ibid. : Antiquam ecclesiam ipsi everterant et maioris venustatis instaurare disposuerant, quod oculis hodieque conspici licet. Nam idem opus tribus a pavimento ulnis porrectum, nobilitatis et potentiae eorum qui aedificare coeperant testimonio est. Collegerant autem cooperiendae aedi immensam plumbi molem, quae ab eis terrae obruta et a nobis nuper inventa est.

[65] Le lieu-dit Noviheria, où les moines firent étape entre Vertou et Saint-Jouin-de-Marnes, est en effet à identifier avec l’actuelle commune de Saint-Varent.  

[66] A ceux précédemment mentionnés, il faut ajouter les noms de Rome, Toulouse, Savenay et Etivault (commune d’Ouzilly-Vignoles),

[67] A ceux précédemment mentionnés, il faut ajouter les noms de l’archidiacre Seguin, Centulfe, âme damnée du roi Dagobert, l’abbé Raimbaud de Vertou, Badilon, avoué du monastère, le prévôt Fulrade à Saint-Jouin-de-Marnes, l’abbé Rainaud et un moine homonyme, des laïcs (un autre Raimbaud, Landri, Sigebrand, Martin), une femme de l’aristocratie, Rainsoinde, et sa suivante Gausberge, et enfin un assez mystérieux Rainolde qualifié dux regionis Franciae, qui présidait aux destinées du Maine. Le cas de Launégisile, revendiqué à la fois par les moines de Vertou et ceux de Saint-Jouin comme l’un de leurs premiers pères mériterait une étude particulière.

[68] Au premier chef, ce qui se rapporte à la micro-société incarnée par le monastère, avec les membres de la communauté régulière (moines ou chanoines) placés sous la direction de l’abbé ou du prévôt, les protecteurs (avoué) et les donateurs, la familia et le personnel de service (serviteur, cuisinier).

[69] Édition Krusch, p. 571 : Miraculorum quoque copia non defuit, quae partim ignaviae oblivioni tradita, partim a venerabili Siguino archidiacono sunt descripta. Quae pauca hic inserimus ut ad transmigrationis historiam ordine veniamus.

[70] René Merlet (éd.), La Chronique de Nantes (570 environ-1049), Paris, 1896, p. xviii-xix.

[71] Ibidem, p. 143-146.

[72] Charles de Grandmaison (éd.), « Chartularium sancti Jovini », Mémoires de la Société de statistique du département des Deux-Sèvres, 18 (1854), 2e partie, p. 14.

[73] A.-Y. Bourgès, « Retour sur les différents types d’approche du matériau hagiographique médiéval par les historiens de la Bretagne depuis le XIXe siècle », Hélène Bouget et Magali Coumert (éd.), Histoires des Bretagnes 6. Quel Moyen Âge ? La recherche en question, Brest, 2019, p. 251-252.

 

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