Deux traditions médiévales qui
avaient cours à l’abbaye cornouaillaise de Landévennec ont connu une
transplantation et une acclimatation en Léon : la première tradition
concerne le pays natal de saint Guénolé et les lieux de sa jeunesse, qui ne se
situeraient pas dans les parages de Saint-Brieuc et en Goëllo (Ploufragan et
archipel de Bréhat) comme l’indiquent les textes hagiographiques les plus
anciens (IXe siècle), mais à Plouguin, plus particulièrement au
village de Lesven, et dans les alentours ; la seconde tradition se
rapporte à l’histoire de Salaün, héros d’une gracieuse légende mariale
localisée à Landévennec et rapportée par l’abbé du lieu, Jean de Langouesnou, mais
par la suite confisquée au profit quasi-exclusif du sanctuaire du Folgoët, près
de Lesneven.
Dans le cadre d’un travail en
cours consacré à l’examen de certaines sources dont s’est servi en son temps le
Père Albert Le Grand de Morlaix, nous reviendrons sur les supposées attaches
familiales de Guénolé et de sa mère, Guen, à Plouguin : il suffit de dire
aujourd’hui que cette localisation se trouvait déjà dans un texte
hagiographique dont Pierre Le Baud eut connaissance aux années 1460-1480[1] ; et
que l’auteur de cette hagiographie, à l’instar de celui de la pseudo-notice qui
figure dans une copie du XVIe siècle du cartulaire de Landévennec[2], ont
sans doute été encouragés, sinon commandités par la famille de Lesguen, dont ils
venaient au soutien des prétentions généalogiques[3].
En revanche, c’est de l’« Histoire
miraculeuse contenant le mystère de Notre-Dame du Folgoët » [4] dont nous
souhaitons aujourd’hui entretenir nos lecteurs ; mais il nous faut dès à
présent indiquer que, si Salaün est décrit comme originaire des environs de
Lesneven, les circonstances de la fondation du sanctuaire proche du Folgoët ne
se trouvent probablement pas dans l’histoire de ce personnage et du miracle
dont il aurait été gratifié après sa mort : le récit en question — comme
l’ont montré plusieurs études récentes, reprenant l’opinion déjà ancienne
exprimée par dom Noël Mars et finalement entérinée par A. de La Borderie[5] — se
rapporte en réalité aux origines d’une chapelle homonyme située à immédiate
proximité et dans la dépendance de l’abbaye de Landévennec. D’ailleurs, comme
nous l’avons déjà indiqué, l’auteur de l’« histoire miraculeuse » du
Folgoët, Jean de Langouesnou, dans lequel nous croyons également pouvoir
reconnaître le compilateur du Chronicon
Briocense et l’arrangeur de la légende de saint Budoc[6], était
abbé du lieu et se présente en outre comme un témoin oculaire des faits[7] qu’il
localise incontestablement dans les parages du grand monastère
cornouaillais : il est clair que les escoles (ainsi Pascal Robin
traduit-il le latin scolae du texte original de Jean de Langouesnou),
fréquentées sans succès par Salaün, dont son biographe souligne ainsi, avec
délicatesse, l’idiotie congénitale, sont plutôt à chercher du côté de
Landévennec que de Lesneven[8] ; il
en va de même pour la fontaine près de laquelle Salaün avait élu domicile[9].
D’autres
arguments pourraient être apportés au renfort de cette hypothèse : le
récit de Jean de Langouesnou laisse en effet entendre clairement que la
chapelle Notre-Dame du Folgoët fut bâtie au-dessus de la sépulture de
Salaün ; or, il n’est jamais question dans l’histoire du sanctuaire
léonard d’un tombeau, ni même simplement d’une marque distinctive qui aurait
permis de repérer cette sépulture. En tout état de cause, l’histoire de Salaün,
contribution sans originalité excessive à la légende mariale, constitue un
intéressant témoignage sur un type de religion moins populaire que marginale,
qui s’exerçait en Bretagne au travers de pratiques dévotionnelles souvent
excessives[10].
Si l’on veut emporter
définitivement la conviction que le touchant récit de Jean de Langouesnou se
rapporte en fait au Folgoët de Landévennec et qu’il a fait l’objet d’une
véritable captation par le sanctuaire homonyme du Léon, il reste à répondre à
trois séries de questions : quelles furent les circonstances de la fondation
du Folgoët de Lesneven ? Quelles étaient les motivations de Jean V quand
il s’intéressa pour la première fois à cette chapelle, dès 1420 ? Quand et
par qui l’histoire de Salaün a-t-elle été introduite sur place ?
Comme nous l’apprennent les
précieux documents réunis par D.-L. Miorcec de Kerdanet[11],
il paraît y avoir eu au Folgoët dès 1410 un sanctuaire qui faisait l’objet
cette année-là de deux donations par Hamon Quiniou et Tanguy de
Coëtmenec’h ; puis à nouveau le 4 octobre 1416 : le donateur était cette
fois un certain Prigent Gouzian. Le 21 mars 1420, un nouvel acte de donation
(par le vicomte de Rohan) mentionne « l’ostel Prigent Gouzian jadix à
ladite chapelle, qui est fait de nouvel »[12],
ce qu’il faut sans doute interpréter comme l’indice d’une reconstruction de
l’édifice entre 1416 et 1420. Les premiers donateurs étaient majoritairement
des habitants du lieu ou des seigneurs du pays : une douzaine de bienfaiteurs,
partagés à peu près également entre nobles et roturiers, ont ainsi précédé le
duc de Bretagne entre 1410 et 1420[13].
Les raisons qui ont motivé leur implication dans la (re)construction du
sanctuaire du Folgoët ne sont pas connues avec précision : nulle référence
en tout cas à l’histoire de Salaün dans les attendus des actes de donation. Par
contre, comme le rappelle T. Malmanche, dont il faut rappeler en la
circonstance qu’il avait suivi, en 1898-1899 et 1899-1900, à l’École pratique
des hautes études, les conférences de la section des sciences historiques et
philologiques où il était inscrit à celle de H. Gaidoz[14],
on vénère au Folgoët la statue d’une « Vierge miraculeuse », ainsi
nommée « parce qu’elle a produit des miracles. Et ceci est absolument dans
l’ordre des choses », poursuit T. Malmanche, qui souligne de
surcroît combien les historiographes sont « peu explicites » quant à
la provenance de cette statue ; « mais ce qui serait contraire à
toute logique », continue le grand dramaturge breton, « c’est
qu’à la suite d’un miracle, on fabriquât une statue miraculeuse… »[15]. Donc, la
statue en question n’a effectivement aucun rapport avec l’histoire de
Salaün ; à l’inverse, contemporaine de la construction de l’édifice[16], elle est
peut-être à l’origine du sanctuaire, au travers d’une découverte « miraculeuse »
comme ce fut le cas vers la même époque à Rostrenen ou à Josselin[17].
Il ne saurait être question
de réduire les motivations de Jean V aux seuls aspects politiques comme on le
voit très souvent : à défaut d’être pieux, l’homme était profondément
croyant, nous le savons, et plein de dévotion à l’égard de l’égard de la Vierge.
Durant sa séquestration par le parti de Blois-Penthièvre, craignant de ne pas recouvrer
sa liberté vivant, le duc avait fait, selon son habitude, une série de vœux
dont le plus célèbre consistait, s’il échappait à son sort, à remettre aux
Carmes de Nantes « son pesant d’or tout armé » ; Jean V s’était
également engagé à se rendre en pèlerinage aux Lieux Saints dans les trois mois
qui suivraient sa libération et son retour en Bretagne. Libéré le 5 juillet
1420, il exécuta le premier vœu le 14 juillet suivant[18]
et obtint rapidement, le 28 août 1420, d’être relevé du second par le pape Martin
V ; mais il dut payer en contrepartie « une somme de 10000 florins de
la Chambre aux fabriques des églises de son duché et une autre somme égale aux
fabriques canoniales de Saint-Jean de Latran et de Saint-Pierre de Rome »[19]. Nous
savons que le duc s’acquitta correctement de cette lourde dette, au moins en ce
qui concerne la somme à donner aux fabriques des églises romaines[20] ;
nul doute qu’il fit de même pour celles de Bretagne, sinon qu’il a peut-être
étalé ses paiements dans le temps en fonction de ses facilités de
trésorerie : voilà l’origine d’une partie au moins de ses multiples
interventions financières au profit de très nombreux sanctuaires. Dès le 8
octobre 1420, le duc avait fait porter son obole à celui du Folgoët par Jean
Droniou[21]. Au
passage, celui-ci passa commande pour son propre compte d’une statue de sainte
Catherine : « taillée dans le kersanton, la sainte porte sur son
voile la couronne ducale, et sur son socle le nom du donateur, Jean Droniou,
trésorier et receveur général de Bretagne de 1420 à 1428 »[22]. On sait
que l’intérêt de Jean V ne devait pas se limiter à ce seul geste et que la
chapelle du Folgoët, bientôt érigée en collégiale, a constitué l’un des plus
beaux fleurons du réseau de sanctuaires « nationaux » voulu par le
duc.
Il reste à déterminer quand
et par qui l’histoire de Salaün a été introduite au Folgoët. Une partie de la
réponse peut être inférée de la peinture à fresque qui, dans la collégiale,
représentait les principaux épisodes de cette histoire et sur laquelle se
voyaient au premier niveau, « vis-à-vis l’un de l’autre, un duc et une
duchesse à genoux, que nous croyons être Pierre II et Françoise d’Amboise,
parce que cette dernière y est vêtue en religieuse carmélite. Le duc, au
contraire, porte son manteau ducal, parsemé d’hermines, et sa couronne est
posée devant lui sur un coussin » ; tout en haut, « Salaun se
présente au B. S. Yves, lequel est ici figuré en soutane noire, rabat blanc et
chapeau à trois cornes. Le même saint est assis devant une table, sur laquelle
on peut lire cette légende tirée de Jean de Langoueznou : nihil
addiscere potuit quam haec duo verba Ave Maria, quae pius duplicabat,
triplicabatque. Enfin dans le lointain, apparaît la ville de Lesneven, avec
ses tourelles, ses arcades, ses monuments»[23].
En 1467, dix ans après la mort de son mari, Françoise d’Amboise avait pris
l’habit du Carmel qu’elle porta jusqu’à sa mort en 1485 ; or, il se trouve
que les Carmes de Saint-Pol-de-Léon ont joué, aux dires du P. Cyrille Le
Pennec, un rôle essentiel dans la promotion du sanctuaire du Folgoët, rôle
d’ailleurs reconnu à sa juste valeur dès 1505 par Anne de Bretagne dont les
religieux obtinrent à l’époque le privilège insigne de pouvoir célébrer sur
place la grand’messe annuelle du 15 août[24].
Nous pouvons donc supposer que le récit de Jean de Langouesnou, dont le
manuscrit était conservé au palais épiscopal, a été acclimaté au Folgoët par
les Carmes de Saint-Pol-de-Léon. La fresque, « quoique d’un dessin barbare
et sans goût », qui lui conférait un certain cachet d’antiquité, ne datait
sans doute que du XVIIe siècle[25]
: l’artiste, toujours sur les indications des Carmes, avait peint la duchesse
avec la robe de leur ordre ; il avait également représenté, d’abord en
compagnie de Salaün, puis assis à sa table de travail, l’hagiographe Jean de
Langouesnou, auquel il avait donné l’habit d’un séculier — « soutane
noire, rabat blanc et chapeau à trois cornes » — d’où la confusion avec
saint Yves dans la notice de D.-L. Miorcec de Kerdanet.
Restent à déterminer le terminus a quo constitué par la transplantation
de cette légende et le terminus ad quem
dont témoigne son acclimatation. Contemporain de la paraphrase en français
composée par P. Robin, nous disposons du témoignage très explicite de Guillaume
Postel :
ad
trium historum liliorum miraculum primo in loco debet poni et haberi lilium de
Folgoet in Cornouailliae episcopatu, ad sepulchrum beati Salaun, ubi cum
litteris aureis scribitur Ave Maria, quia devotissimus Beatae Mariae assidue
dicebat O O O O O O Maria Ave Maria semper jejunans in pane et aqua et Virgo
manens juxta fontem in cava arbore agens.
La localisation in
Cornouailliae episcopatu, malgré l’étrangeté de la forme employée ne laisse
en effet que peu de place au doute : le lieu de la sépulture de Salaün et du
miracle du lys n’est pas situé en Léon, mais en Cornouaille, du moins dans
l’opinion de Postel, à qui tout esprit de clocher devait en l’occurrence être
étranger puisqu’il n’était pas breton[26].
Soulignons à cet égard qu’un homonyme, Jean Postel, peut-être un parent, car il
évoluait dans le même milieu curial que Guillaume, était sensiblement à la même
époque doyen commendataire du Folgoët[27].
Les jésuites Mathieu Rader et
Philippe de Berlaymont dans leurs ouvrages respectifs publiés en 1614 et 1619[28] s’en
tiennent au texte de Jean de Langouesnou auquel ils font explicitement
référence : nulle part, dans ces résumés assez secs, il n’est fait référence
au Folgoët, de Cornouaille ou de Léon, et le seul toponyme mentionné l’est par
Berlaymont, qui rapporte comment Salun
conferebat se ad certum quidam fontem ab urbe Landevenec una ferme leuca
dissitum. En fait, il faut attendre la
publication en 1634 de l’ouvrage du P. Cyrille Le Pennec suivi, en 1637, par la
somme hagiographique d’Albert Le Grand, qui consacre une notice à « L’histoire
de la fondation de Nostre-Dame du Follcoat, en Léon le 8 mars », pour voir
apparaître des modifications sensibles de la légende originelle, dans la
perspective de son enracinement léonard. A cette occasion, le Père Cyrille vient
enrichir le récit du miracle avec un motif supplémentaire : s’il était
bien question, dans le premier état de la légende, du lis qui pousse sur la
tombe de Salaün après sa mort et dont les fleurs portent inscrites en lettres d’or
les mots : Ave Maria — les seuls mots
latins que le pauvre innocent eût jamais réussi à apprendre quand il
fréquentait à Landévennec l’école du monastère — rien n’était dit au sujet
d’une fouille du tombeau qui aurait montré que le lis sortait de la bouche même
de Salaün. Comme le souligne dom Gougaud[29], ce
second motif hagiographique a certes souvent accompagné, mais pas
systématiquement, le premier. Le Père Cyrille a pu emprunter le rapprochement
de ces deux motifs à la Légende dorée,
pour les faire figurer ensemble dans le récit miraculeux du Folgoët. Quant à la
célèbre réponse de Salaün aux soudards qui le pressaient de se déclarer pour
tel ou tel parti pendant la guerre de Succession de Bretagne : ni Blois, ni Montfort, vive Madame Marie
— formule à laquelle paraît faire écho six siècles plus tard le célèbre slogan
autonomiste breton : na ruz, na gwenn,
Breizhad hepken — elle apparaît dans l’ouvrage du Père Albert, qui a
peut-être trouvé l’anecdote dans ses propres sources léonardes.
Reste à savoir pourquoi Jean
de Langoueznou, si du moins son traducteur lui a été fidèle, a brodé dans son
récit autour du seul premier motif : son ignorance du stade le plus élaboré de
la légende du tombeau fleurdelisé paraît peu vraisemblable compte tenu du
succès et de la diffusion de la Légende
dorée. Mais envisager qu’un scrupule de l’historien qu’il était peut-être
l’ait retenu d’accentuer le caractère miraculeux déjà très affirmé de
l’histoire de Salaün, c’est assez sûrement risquer d’encourir à nouveau le
reproche d’une interprétation trop rationalisante et trop restrictive de ce que
le père Le Jollec avait quant à lui désigné en son temps l’événement du Folgoët et qui, s’agissant du sanctuaire léonard, s’apparente
plutôt à un non-événement, du moins
vu de Landévennec.
André-Yves Bourgès © 2014
[1] P. Le
Baud, Chroniques et Ystoires des Bretons, livre 3, édition [partielle]
par Ch. de la Lande de Calan, t. 2, Nantes, 1910, p. 17.
[2] Ms
Paris, BnF, lat. 9746, f. 79v. A. Ramé, « Rapport sur le cartulaire de
Landévennec », Bulletin philologique et historique du Comité des
Travaux historiques et scientifiques, 1882, p. 420, évoque l’hypothèse d’une
possible copie intermédiaire datée 1436. Cette hypothèse, comme le signale
J.-C. Poulin, L'hagiographie bretonne du
Haut Moyen Âge. Répertoire raisonné, Ostfildern, 2009 (Beihefte der Francia, 69), p. 410, a été développée « sans doute sur la foi d’une mention
ajoutée à la fin de l’acte 39 du cartulaire, au fol. 76v, mais absente du ms.
de Quimper : Anno Domini millessimo (sic) CCCC.XXX.VI ».
[3] R.
Latouche, Mélanges d’histoire de la Cornouaille
(Ve-XIe siècle), Paris, 1911, p. 28, n. 5.
[4] Tel est
le titre de la paraphrase française par Pascal Robin, sieur du Faux, du récit
de Jean de Langouesnou, autrefois conservé dans le trésor de la cathédrale de
Saint-Pol-de-Léon ; cette paraphrase a été insérée dans le recueil
intitulé Histoire de la vie, mort, passion et miracles des saints, dont
le maître d’œuvre était René Benoist et qui a connu deux éditions, l’une et
l’autre parisiennes, en 1579-1580 et en 1607. Nous avons utilisé le texte donné
par L. Lécureux, « La légende de Notre-Dame du Folgoët », Bulletin de la société archéologique du
Finistère, t. (1916), p. 119-132, d’après l’édition de 1579-1580 (avec les
additions de l’édition de 1607) et celui donné par J. Le Jollec, Histoire
miraculeuse contenant le mystère de Notre-Dame du Folgoët. Essai critique,
Quimper, 1949, p. 12-18, d’après la seule édition de 1607. L’original latin de
Jean de Langouesnou (en latin), également connu des jésuites M. Reder et Ph. de
Berlaymont, ainsi que du P. Cyrille Le Pennec, qui semble en avoir eu
communication de la part d’un chanoine du Folgoët, a depuis disparu ; mais
sa réalité est incontestable et — outre la belle et célèbre hymne mariale Languentibus
in purgatorio, composée pour la même occasion — deux très courtes citations
de cet ouvrage ont été conservées : voir Le dévot pèlerinage du Folgoët,
publié en 1634 par le P. Cyrille Le Pennec, réédité par D.-L. Miorcec de
Kerdanet dans son édition des Vies des
saints de la Bretagne armorique, d’Albert Le Grand, p. 81 et 82.
[5] Voir la synthèse
de dom M. Simon, « Le Folgoat de Landévennec : la tradition des
moines », dans Mémoires de la Société d’histoire et d’archéologie de
Bretagne, t. 75 (1997), p. 37-43.
[6] A.-Y.
Bourgès, « Jean de Langouesnou, abbé de Landévennec, auteur du Chronicon Briocense ? », Hagio-historiographie médiévale (30
novembre 2005) [accessible en ligne à l’adresse : http://hagio-historiographie-medievale.org/2005_11_01_archive.html].
[7] « Je,
Jean de Langoueznou, Abbé dudit lieu de Landevennec, ay esté présent au miracle
cy-dessus, l’ay veu, et ouy, et si l’ay mis par escrit à l’honneur de Dieu et
de la benoiste Vierge Marie ».
[8] « Or
il advint que tel enfant Salaün fust envoyé aux escoles en l’aage puéril, et
n’y sçeut apprendre autre chose que ces paroles en latin, Ave Maria c'est-à-dire,
je te saluë, ô Marie ! lesquelles il redisoit fort souvent, jusques à
trois, quatre, cinq et six fois ordinairement. Il fut ainsi renommé par tout la
contrée de Landevenec et aux environs, en cherchant l’aumosne… »
[9] « Parquoy
les habitans du pays lui distribuoient sur l’heure ce qu’il [sic] devoient manger eux mesmes : et
lors s’en alloit à une certaine fontaine esloignée de la dicte ville [var. :
cité ville] de Landevenec de demie-lieüe de Bretagne (qui revient bien à
trois quarts de lieüe de France ou d’Anjou mesme) qui est du costé du midy ».
[10] Les
pratiques ascétiques et pénitentielles décrites dans ce texte mériteraient un
examen plus approfondi. Certaines sont « traditionnelles » (Salaün
est un pauvre, un mendiant) : le pain mouillé dans l’eau pour toute
nourriture ; le coucher à même le sol. D’autres sont plus
« étonnantes » (Salaün est un « fol ») : l’immersion
jusqu’aux aisselles dans l’eau glacée (rappel du baptême ? Simulacre ordalique
? Régulation de la libido ?) ; l’oraison mariale codifiée, tout en
s’accrochant aux branches d’un arbre (souvenir des saints dendrites ?)
[11] D.-L.
Miorcec de Kerdanet, « Notice sur Notre Dame du Folgoat composée sur les
titres originaux », dans son édition des Vies des saints de la Bretagne armorique, d’Albert Le Grand, p.
115-184.
[12] Idem,
p. 128.
[13] Id.,
p. 129.
[14] École
pratique des hautes études, Section des sciences historiques et philologiques, Annuaire (1900), p. 124 ; Annuaire (1901), p. 175.
[15] T.
Malmanche, La Vie de Salaün qu’ils nommèrent Le Fou, suivie du Conte de
l’Ame qui a faim. Version Française avec une Introduction de l’Auteur, 2e
édition, Paris, 1926, p. LVII.
[16] D.-L.
Miorcec de Kerdanet, « Notice sur Notre Dame du Folgoat composée sur les titres
originaux », p. 124.
[17] Ch.
Prigent, Pouvoir ducal, religion et production artistique en Basse-Bretagne
1350-1575, p. 488-489.
[18] H.
Martin, Les Ordres mendiants en Bretagne
(vers 1230-vers 1530)…, p.
218-219.
[19] B.-A.
Pocquet du Haut-Jussé, Les papes et les ducs de Bretagne. Essai sur les
rapports du Saint-Siège avec un État, p. 356.
[20] Ibid.
[21] R.
Blanchard, Lettres et mandements de Jean
V, duc de Bretagne, [5 vol.] Nantes, 1889-1895, n° 1464.
[22] Ch.
Prigent, Pouvoir ducal, religion et production artistique en Basse-Bretagne
1350-1575, p. 182. Ainsi, l’origine bretonne de la Vierge d’Alexandrie et
même son appartenance à la dynastie ducale étaient donc déjà acquises à cette
date.
[23] D.-L.
Miorcec de Kerdanet, « Notice sur Notre Dame du Folgoat composée sur les
titres originaux », p. 122.
[24] C. Le
Pennec, Le dévot pèlerinage du Folgoët, p. 98.
[25] J.
Cambry, Voyage dans le Finistère [avec des notes du chevalier de
Fréminville], réédition, Paris, 2000, p. 166, n. 11
[26] A.-Y.
Bourgès, «Un témoignage sur l'existence en Cornouaille au XVIe
siècle d'une tradition locale relative à Salaün et au miracle du Folgoët »,
Hagio-historiographie médiévale (10
mai 2009) [accessible en ligne à l’adresse : http://hagio-historiographie-medievale.org/2009/05/un-temoignage-sur-lexistence-dune.html].
[27] D.-L.
Miorcec de Kerdanet, « Notice sur Notre Dame du Folgoat composée sur les
titres originaux », p. 153-157.
[28] M.
Rader, Viridarii Sanctorum. Pars altera,
Münich, 1614, p. 177-179 ; Ph. de Berlaymont, Paradisus puerorum, Cologne, 1619, p. 768-769.
[29] H.
Gougaud, « Recherches sur une légende mariale du Moyen Age », Quatrième congrès marial breton (septembre
1913), Quimper, 1915, p. 469- 476 ; réédition dans G. Milin et P.
Galliou [dir.], Hauts lieux du sacré en
Bretagne, Brest (1997), p. 42-47 (Kreiz, 6). Le relevé de dom Gougaud tend
à montrer que le premier motif, celui du lis dont les fleurs portent Ave Maria et qui pousse sur le tombeau
d’un innocent dévoué sa vie durant au culte de la Vierge, est sans doute le
plus ancien ; et qu’il s’est développé en même temps que les abbayes
cisterciennes, précisément au moment où l’essor économique de ces maisons a
dépassé les possibilités de travail des moines eux-mêmes et où ces derniers ne
s’étaient pas encore résolu à confier à des tenanciers le faire-valoir de leur
immense richesse foncière : il a fallu alors faire massivement appel aux frères
convers dont les origines, pour nobles qu’elles fussent à l’occasion — le
relevé de dom Gougaud évoque à plusieurs reprises le cas de chevaliers entrés
tardivement dans la vie monastique et il s’agit là manifestement d’un topique —
ne préparaient pas forcément, surtout chez un soldat qui pouvait avoir reçu
durant sa carrière nombre de coups sur le crâne, à l’acquisition intellectuelle
du bagage de culture latine exigé pour être moine du choeur. En revanche, cette
main d’oeuvre rustique, aux
différents sens actuels du terme, témoignait d’un zèle religieux qu’il
convenait d’encourager par des exempla
auxquels elle pût s’identifier. A ce premier motif est venu s’adjoindre dès
avant la fin du XIIIe siècle celui du lis qui sort de la bouche de
l’innocent enterré sous ce lis, motif évidemment inspiré de celui très proche
de l’arbre miraculeux aux feuilles également pleines d’Ave Maria qui prend racine dans la bouche de celui dont il protège
le tombeau.